Les orgues de facteurs français au Moyen-Orient


 

 

Depuis le XIXème siècle, la facture d'orgue française, réputée à juste titre, s'est exportée au-delà des frontières hexagonales. Dans cet article seront présentés quelques instruments français du Moyen-Orient. Le Liban faisant l'objet d'un article à part, il ne sera pas ici question des orgues de ce pays (http://www.musimem.com/orgues_anciennes_colonies.htm).

 

 

Le Caire - Chapelle du collège des Jésuites
Le Caire, chapelle du Collège des Jésuites
(coll. O. Geoffroy) DR.

EGYPTE

 

Le Caire, chapelle du Collège des Jésuites :

Dans la chapelle de ce collège de La Sainte-Famille (séminaire fondé en 1879), un orgue du facteur marseillais François Mader a été installé dans la partie gauche de la tribune en 1892. La traction est mécanique et l'instrument compte 11 registres.

 

« L'orgue de choeur Merklin et Kühn de la cathédrale de Saint-Brieuc (Côtes d'Armor) était destiné à l'origine à une église ou chapelle de religieux français d'Egypte (cf. Hippolyte Corbes, « Les orgues du département des Côtes du Nord », Bulletins et Mémoires de la Société d'Emulation des Côtes du Nord, tome XCIV, Saint-Brieuc, Les Presses bretonnes, 1966, p. 67-68 et 77). L'instrument à transmissions électro-pneumatiques a été construit en 1956 et inauguré le 16 mai 1958. Il compte seize jeux répartis sur deux claviers et pédalier et sa composition est la suivante :

 

Grand-orgue (56 notes) : Montre 8', flûte 8', bourdon 8', prestant 4', fourniture IV rgs.

Récit expressif (56 notes) : Cor de nuit 8', gambe 8', voix céleste 8', flûte 4', nasard 2 2/3', doublette 2', tierce 1 3/5', trompette 8'.

Pédalier (30 notes) : Soubasse 16', basse 8', flûte 4'.

 

 

TURQUIE

 

Istanbul, chapelle de l'Ambassade de France (église Saint-Louis des Français) :

A l'origine, un orgue de Joseph Merklin sur deux claviers et pédalier avait été installé dans cette chapelle en 1894. Après sa disparition au cours de la Première Guerre mondiale, il a été remplacé par l'orgue Mutin-Cavaillé-Coll construit pour le prince Ibrahim Tevfik Efendi, fils de Mehmet Burhaneddin Efendi, racheté en 1925 par les pères Capucins pour 37 500 francs.

 

Istanbul, Union Church :

Les restes, bien modestes, d'un orgue Mutin-Cavaillé-Coll se trouvent en tribune de cette petite chapelle. Seules la façade du buffet et la console sont encore préservées. La tuyauterie, la soufflerie et la transmission ont disparu. Cet orgue disposait des jeux suivants :

 

Grand-orgue (56 notes) : Bourdon 16', montre 8', flûte harmonique 8', salicional 8', prestant 4'.

Récit expressif (56 notes) : Cor de nuit 8', gambe 8', voix céleste 8', flûte douce 4', trompette 8', basson-hautbois 8'.

Pédalier (30 notes) : Soubasse 16'.

Tir. I et II, acc. II/I en 16 et 8, anches II.

 

Cet instrument avait été construit en 1923-24 pour le "Couvent Notre-Dame-de-Sion", établissement français d'enseignement à Istanbul. Terminé par Convers et livré en 1925, il figure dans le catalogue Mutin de 1923 (Paris, Sénart, p. 32). En 1976, l'orgue a été déplacé en tribune de l'Union Church et a été joué durant plus de vingt ans avant de connaître des problèmes mécaniques et d'être démonté et de disparaître quasi entièrement, à l'exception des quelques éléments signalés dans le paragraphe précédent.

 

 

ISRAEL

 

Jérusalem, Couvent des Soeurs de Sion :

En tribune de cette chapelle, un orgue du facteur marseillais François Mader a été monté en 1893. En 1935, il a été réparé par Rieger et, par la suite, la composition a été sensiblement modifiée dans une direction néo-classique.

 

Les transmissions mécaniques ont été préservées. Composition :

Grand-orgue (56 notes) : Bourdon 16', montre 8', flûte harmonique 8', prestant 4', quinte 2 2/3', plein-jeu.

Récit expressif (56 notes) : Bourdon 8', salicional 8', flûte à cheminée 4', dulciane 4', quarte 2', trompette 8', basson-hautbois 8'.

Pédalier (27 notes) : Soubasse 16', basse ouverte 8'.

Tir. I et II, acc. II/I, trémolo II.

 

La quinte du grand-orgue a remplacé un jeu de violoncelle 8' et, au récit, la flûte douce 4' et la quarte 2' ont pris la place d'une voix céleste et d'une voix humaine 8'.

 

Jérusalem, église Saint-Pierre de Sion :

C'est sur la tribune de cet édifice qu'est placé un orgue à traction mécanique de François Mader. Construit en 1898 et inauguré en 1900, il est resté longtemps muet avant d'être restauré en 2007. Sa composition est la suivante :

 

Grand-orgue (56 notes) : Bourdon 16' (basses et dessus), montre 8', flûte harmonique 8', gambe 8', prestant 4'.

Récit expressif (56 notes) : Quintaton 8', salicional 8', voix céleste 8', dulciane 4', trompette 8'.

Pédalier (24 notes) : en tirasses.

Tir. I et II, acc. II/I, trémolo II.

 

Bethléem, chapelle de l'Université :

Dans une ancienne chapelle franciscaine située au milieu des bâtiments de l'Université se trouve un orgue du facteur alsacien Roethinger inauguré le 27 décembre 1961. Cet instrument à transmissions électro-pneumatiques est doté d'un buffet en acajou et de la composition suivante :

 

Grand-orgue (56 notes) : Montre 8', bourdon 8', prestant 4', fourniture VI rgs, cromorne 8'.

Récit expressif (56 notes) : Principal 8', cor de nuit 8', voix céleste 8', flûte conique 4', quarte de nazard 2', sesquialtera II rgs, trompette 8'.

Pédalier (30 notes) : Soubasse 16', principal 8'.

Tir. I et II, acc. II/I et octaves, combinaisons fixes, annulation anches.

 

( sources principales : http://www.orgbase.nl/index_fr.html et http://organ.org.il/pws/page!5273 )

 

Documentation réunie par Olivier Geoffroy

(avril 2019)






articles complémentaires sur les orgues de Terre-Sainte et du Moyen-Orient

 

Les extraits de périodiques suivants ne concernent pas que les instruments fabriqués par des facteurs français mais traitent de la question des orgues au Moyen-Orient et en Terre-Sainte de façon plus générale.

 

Orgue de la nouvelle église d'Alep
(in Terre-Sainte, 15 septembre 1938, p. 206) DR.

La Terre-Sainte :

 

« L’orgue de Bethléem :

Après avoir reçu les bénédictions de la Sainte Eglise, le nouvel instrument fit entendre, à nos oreilles ravies, sa voix pleine de suavité, sous les doigts habiles de nos artistes de Saint Sauveur et de Bethléem. Toutes les félicitations de « Terre Sainte » au Révérend Père Bonaventure Mazzella dont le travail patient et artistique a doté l’église conventuelle et paroissiale de Bethléem d’un aussi bel orgue. »

(n° du 15 juillet 1927, p. 177)

 

« Inauguration du Grand Orgue de Ste Catherine d’Alexandrie - 22 Octobre :

 L’orgue instrument multiple, dont les sons distincts se produisent et se marient selon les lois que le génie de l’homme a extraits de la musique universelle pour les appliquer à la louange divine. […]

Celui que bénissait à Alexandrie le 22 Octobre dernier, Monseigneur Nuti, Vicaire Apostolique d’Egypte, est une quasi merveille. Il n’a pas moins de 36 registres et est l'oeuvre du célèbre Balbiani de Milan. Il fut monté par le R.P. David Grisafi de l’Ordre des Frères Mineurs. […] Aussitôt après sa bénédiction, l’orgue nouveau, sous les pulsations d’artistes de premier ordre, fit entendre sa grande voix et remplit l’église de sa religieuse harmonie. Nous entendîmes ses voix profondes et ses voix suaves, ses voix tendres et ses voix tremblantes, ses voix plaintives et ses voix joyeuses, ses voix éclatantes, ses voix d’hommes et et ses voix d’ange interprétant noblement les oeuvres des grands maîtres Bach, Beethoven, Guillemant, Mailly, Händell, Bossi, Ferrata etc. »

(n° du 15 novembre 1927)

 

« Nouvel Orgue — Le 89 août le Révérendissime Père Custode bénissait le nouvel orgue que la custodie de Terre Sainte vient de faire placer dans les galeries du St. Sépulcre.

Le lendemain une messe en musique chantée par l’orphelinat des Franciscains sous l’habile direction de Monsieur Augustin Lama inaugurait définitivement le magnifique instrument sorti des ateliers Rieger de Chécoslovaquie. »

(n° du 15 septembre 1935, p. 214)

 

« Mardi 9 août 1938, a eu lieu la bénédiction et l’inauguration des grandes Orgues de l’Eglise Paroissiale de Terre Sainte d’Alep. Le R. P. Jacques Meliota, gardien du Couvent, a donné la bénédiction en présence d’une assistance d’élite. Le R. P. Barthélemy Héroux, curé français, prononça l’allocution de circonstance dans laquelle, après avoir souhaité la bienvenue aux autorités religieuses, civiles et militaires d’Alep, il développa le rôle de la musique religieuse dans la liturgie et esquissa les traits de la patronne de la musique, sainte Cécile. A cette occasion, le R. P. David Telo, organiste du Sanctuaire de l’Annonciation à Nazareth donna un récital composé de pièces variées et liturgiques, mettant en valeur les harmonies des vingt-cinq registres des Orgues nouvelles. Ce programme mérite d’être reproduit :

1 Grand Choeur, Piglia. 2. In Paradisum, Th. Dubois. 3. Scherzo, P. Cappocci. 4. Idylle Pastorale, Clementoni. 5. Solo de haubois, P. Cappocci. 6. Cantilène nuptiale, Th. Dubois. 7. Musette, Rémondi. 8. Toccata, Th. Dubois. […]

 

Les Grandes Orgues que la Custodie de Terre Sainte vient de faire installer dans l’Eglise Latine d’Alep sont l’oeuvre de la Maison Rieger de Jagendorf en Tchécoslovaquie. Elles se composent de 2.800 tuyaux répartis sur vingt-cinq registres actionnés par deux claviers et un pédalier. Le grand orgue comprend huit registres ; l’orgue d’expression, douze et le pédalier, cinq. Les combinaisons obtenues des différents registres dépassent la cinquantaine ; elles s’obtiennent au moyen d’un mécanisme électrique tout-à-fait moderne. »

(n° du 15 septembre 1938, p. 205-207)

 

Autres articles extraits du périodique La Terre-Sainte

 

Tuyaux de l'orgue Tamburini
(n Terre-Sainte, juillet 2004, p. 206) DR.

« Pour inaugurer la nouvelle console de l’Orgue de l’église de St-Sauveur, qui vient d’être restauré et enrichi de nouveaux registres, la communauté franciscaine a offert, le 27 janvier, un concert à ses amis et aux communautés de tous rites. […]

L’orgue de St-Sauveur avait été construit par Charles Veggesi Bossi de Turin, en 1909. La nouvelle console est l’œuvre de la Maison Tamburini de Crema, et les autres parties nouvelles ont été fabriquées par nos ouvriers de St-Sauveur, sous la direction du V. F. Delfin Fernandez, maître-organier. L’église St-Sauveur recevra bientôt, nous l’espérons, d’autres modifications, pour être mieux adaptée aux célébrations liturgiques ».

(n° d'avril 1967, p. 95-96)

 

« Les visiteurs du centre de l’Archiconfrérie du T.S.E. JESUS pourront […] contempler les nouvelles fresques décorant la Chapelle restaurée, (œuvre d’un pèlerin français), ainsi que les orgues Roethinger de Strasbourg. »

(n° de janvier 1969, p. 27)

 

Le Frère Fernandez Delfin (ofm) en 2001, facteur d'orgues pour la Custode de Moyen-Orient depuis plus de 50 ans
(in Terre-Sainte, juillet 2001, p. 224) DR.

« A l’église franciscaine Ste-Catherine de Bethléem est installé un nouvel orgue, fabriqué par notre organier, Fr. Delfin Fernandez, avec des éléments de l’orgue des Luthériens de Jérusalem et du vieil orgue (de Bazzari) du St-Sépulcre. Le buffet est constitué en partie de pièces d’ébénisterie de l’ancienne chaire de l’église. Console de Tamburini (Italie). Quatre claviers : 3 manuels à 61 notes chacun et un pédalier à 32 notes. 52 registres, 3774 tuyaux (480 aux pédales, 732 à l’orgue positif tergal, 1525 au grand-orgue, 1037 à l’orgue expressif).

L’ancien orgue était abîmé et ne répondait plus aux besoins liturgiques du Sanctuaire, ou à des productions musicales de concerts. »

(n° d'avril 1976, np)

 

« Après trois ans de travail environ, le nouvel orgue de notre église paroissiale latine de Bethléem est terminé. Il a été réalisé en notre atelier spécialisé de St-Sauveur, atelier qui, d’après nos archives custodiales, remonte au milieu du XVIIème Siècle. Le Fr. Delfin Fernandez en est le directeur depuis 1952, après avoir étudié et s’être spécialisé en la matière à la “Pontificia fabrica d’organi” Tamburini, en Italie. Il est maintenant assisté de deux ouvriers arabes chrétiens de Jérusalem, qu’il a lui-même formés.

Cet orgue remplace l’ancien, à mécanisme pneumatique, qui fut construit au même atelier de St-Sauveur, sous la direction du P. Bonaventura Mazzella (1924-1927).

Réparé une première fois en 1929, il fut transformé en 1954 par le Fr. Delfin et muni d’une transmission électronique. Cependant il s’avérait de plus en plus insuffisant pour les besoins liturgiques du Sanctuaire, spécialement aux époques de Noël, de l’Epiphanie et de Pâques.

Le nouvel orgue compte 55 registres, avec quatre sources de sons : le Grand Orgue, le Positif, l’Expression (pour régler l’intensité) et la Pédale. Compte tenu des dimensions du Sanctuaire, cet instrument respecte les qualités de l’orgue italien, ancien et moderne. »

(n° de novembre 1978, p. 246-247)

 

« Inauguration du grand orgue à la basilique du Saint-Sépulcre. 

Le jeudi 29 avril 1982, dans la basilique du Saint-Sépulcre, a été solennellement inauguré le nouveau grand orgue. La première installation de cet instrument, pour l'accompagnement des chants liturgiques, remonte à l'an 1817. Il fut monté vis-à-vis de l'autel de Ste Marie-Madeleine. Un second, plus important, fut installé, en 1896, dans la galerie de l'Anastasis (propriété latine) ; il fut offert par ses fabricants autrichiens Gustave et Otton Rieger de Fagendorf. Rénové et amplifié en 1935, cet orgue resta en usage jusqu'en 1970, date à laquelle il dut être démonté à cause des restaurations de la basilique. Ces dernières étant assez avancées pour envisager sa réinstallation, le Gouvernement autrichien s'est offert pour monter un nouvel orgue, digne de la basilique de la Résurrection. Le travail a été confié à la Maison Rieger qui avait offert le premier ; après en avoir construit les éléments dans leurs propres ateliers en Autriche, les techniciens sont venus sur place les installer. Le nouvel orgue comporte deux claviers manuels et pédalier, avec 43 registres. Une console spéciale permet d'en combiner l'usage avec celui de Ste Marie-Madeleine. »

(n° de juillet 1982, p. 210-211)

 

« Nouvel orgue dans la basilique de Nazareth.

En juillet 1982, un nouvel orgue a été installé dans la tribune sud du chœur de la basilique supérieure de Nazareth. Il est l'œuvre de l'atelier spécialisé de notre couvent de Saint-Sauveur de Jérusalem, dirigé par le Fr. Delphin Fernandez, auquel nous devons d'autres travaux de ce genre, en particulier à Saint-Sauveur et à Bethléem. Pour ce nouvel orgue ont été utilisés les tuyaux d'instruments anciens, combinés avec du matériel neuf. »

(n° de janvier 1983, p. 43)

 

« Une distinction bien méritée.

Le 10 juillet 1983, notre Frère Delfin Fernandez, responsable de l'atelier des orgues au couvent Saint-Sauveur, a reçu une distinction bien méritée : S.B. le Patriarche Mgr Beltritti lui a remis, en présence du P. Custode de Terre Sainte et de plusieurs prêtres du Patriarcat latin de Jérusalem, la "palme d’argent de l'Ordre Equestre des chevaliers du Saint-Sépulcre”, qui lui avait été décernée le 8 juin précédent par le Cardinal Maximilien de Furstenberg, Grand Maître de l'Ordre.

En la lui remettant, le Patriarche a exprimé au frère sa gratitude personnelle et celle de son clergé patriarcal pour la construction d'un nouvel orgue dans la concathédrale latine de Jérusalem.

Déjà, en 1979, en récompense de son bon travail en ce même champ d'action, Fr. Delfin avait reçu du Roi d'Espagne, Juan Carlos 1er, la "Cruz de Oficial de Isabel la Catolica". »

(n° de janvier 1984, p. 46)

 

« Gethsémani, nouvel orgue et aménagements appréciés.

Le 1er juillet 1984, dans la basilique de Gethsémani, a été célébrée la messe annuelle du Précieux Sang, présidée par le P. Justo Artâraz, Vicaire custodial, remplaçant le P. Custode absent. […] Depuis des années, on envisageait d’installer en ce sanctuaire important et tant aimé un orgue destiné à rehausser les cérémonies nombreuses qui y sont organisées.

Le problème de son emplacement a été l’objet d’une étude attentive, compte tenu de l’acoustique très difficile de l’église ; on a finalement choisi l’entrée de l’abside du côté sud. Le nouvel orgue n’a rien de monumental, ses dimensions sont plutôt réduites. Cependant, grâce à un système de transmission électronique, il produit l’effet d’un grand orgue, par la qualité et la diversité de ses sons plus que par le nombre, limité, de ses tuyaux : ces derniers atteignent le chiffre de deux cent cinq, mais ils donnent l’impression d’être moitié plus nombreux. Ajoutons que cet orgue s’adapte parfaitement à l’atmosphère particulière de la basilique de Gethsémani: il n’a pas été conçu pour des exécutions musicales comme les concerts, mais pour soutenir et accompagner les chants religieux. »

(n° de novembre 1984, p. 277-278)

 

« Un nouvel orgue.

La "Fabrique d'orgues de la Custodie de Terre Sainte", officiellement "Officina sacris extruendis organis", dirigée depuis 1952 F. Delfin Fernandez, vient de terminer la construction d'un nouvel orgue qui s'ajoute à la série déjà longue de ceux qui ont vu le jour dans l'atelier de montage de la Custodie.

Le nouvel orgue, du type "Multiplex”, a été installé à Abou Gosh, dans la basilique des croisés, desservie par les Pères Bénédictins et propriété du gouvernement français. Abou Gosh est un site biblique, la Qiryat-Yéarim du premier livre de Samuel (7,1), l'endroit où demeura l'Arche de l'Alliance, dans la maison d'Abinadab, "laquelle est située sur une colline".

L'orgue, construit en l'espace de 4 mois, possède un clavier de 56 touches, un pédalier de 27 notes et trois rangées de tuyaux. La rangée, appelée Principal, comporte 68 tuyaux, celle du Bourdon 82 et celle du Cor anglais 56. En recourant au système de transmission électronique, le F. Delfin est parvenu, avec ces 206 tuyaux, au lieu des 531 normalement nécessaires, à actionner 10 registres.

Le nouvel orgue qui servira à accompagner le chant liturgique, a été payé par le gouvernement français. Il n'est pas sans intérêt de signaler que le gouvernement avait projeté de le faire construire en France, mais que, vu la qualité des orgues fabriquées dans les ateliers de la Custodie, il a préféré en confier la construction à la "Fabrique d'orgues de la Custodie de Terre Sainte". »

(n° de juillet 1987, p. 188-189)

 

« C’est en 1952 qu’est arrivé à Jérusalem le Frère Delfin Fernandez, qui venait d’étudier la profession de facteur d’orgues à Milan chez le constructeur Costamagna et avec le maître Eugénio Consonni. Depuis une cinquantaine d’années il a créé un grand nombre d’orgues nouvelles :

à la basilique Sainte Catherine de Bethléem, avec 30 registres;

à la basilique de l’Annonciation à Nazareth, avec 40 registres;

à l’église concathédrale du Patriarcat Latin à Jérusalem, avec 20 registres;

à la basilique de Gethsémani, un petit orgue destiné à l’accompagnement des chants;

sur le Calvaire, dans la basilique du Saint Sépulcre, un très petit orgue;

à la paroisse latine de Ramalah;

à la basilique croisée des Pères Bénédictins, à Abou Gosh.

Ce fut aussi une véritable création que le travail réalisé pour l’orgue de l’église franciscaine Sainte Marie à Larnaca (dans l’île de Chypre). Dès le XVIIe s. Chypre avait eu des orgues construites à Venise. Maisla petite communauté latine, desservie par les franciscains, n’avait pas pu continuer à entretenir l’ancien orgue de Larnaca; il n’était plus utilisé. Il était immense, avait 700 tuyaux et un mécanisme compliqué.

Le Frère Delfin créa un orgue de 207 tuyaux avec mécanisme électrique. Il fut inauguré le 24 juin 1989. Ce fut également une quasi-création que l’oeuvre accomplie pour l’orgue des Pères Carmes du monastère Stella Maris du mont Carmel à Haïfa. C’était un orgue datant de 1907, créé à Turin. Depuis une trentaine d’années il n’était plus utilisé. Les intempéries, le chaud et le froid, l’avaient déréglé. L’orgue fut démonté, transporté à l’atelier de Jérusalem et reconstruit de manière très neuve, et électrifié selon le système électrique le plus moderne.

Si un nombre non négligeable d’orgues furent créées, le travail de l’atelier a comporté surtout de multiples réparations d’orgues existantes, par exemple celui de la chapelle Sainte Marie-Madeleine dans la basilique du Saint Sépulcre, ou celui du sanctuaire de la Visitation à Aïn-Karem. Certaines de ces restaurations ont donné lieu à des épisodes qui méritent d’être racontés. En 1961, lorsque mourut le premier Ministre du Congo, Patricio Lomumba, le Président d’Égypte Abdel Nasser demanda aux franciscains du Caire de prévoir une cérémonie funèbre solennelle dans leur église Saint Joseph, avec marche funèbre au grand orgue. L’organiste, P. Erminio Roncari, répondit que c’était impossible, l’orgue, de fabrication allemande, étant hors d’usage. Nasser demanda au P. Roncari de faire venir, aux frais de l’État égyptien, un facteur d’orgue et de faire faire les réparations. C’est donc en auto officielle que Fr. Delfin arriva au Caire et en repartit. Il restaura l’orgue et l’église fut remplie de musulmans, y compris le président Nasser. Devant un énorme catafalque était déposée une immense couronne de fleurs avec l’inscription : “A la mémoire de Lomumba, héroïque martyr congolais, les anciens élèves des Frères du Caire”.

Le Fr. Delfin vint souvent en Égypte pour réparer les orgues de l’église de Muski, de l’église franciscaine de Sainte Catherine d’Alexandrie, des églises des Salésiens et des Lazaristes d’Alexandrie, les orgues d’Ibrahimieh, de Port Saïd et d’Ismaélia et les harmoniums de Boulac, de Damanhour, de Kfr Dawar, de Kfr Ez-Zayat, de Meadi, etc... Une autre anecdote vaut d’être citée. Le temple protestant de Meadi, au Caire, avait un orgue qui fonctionnait mal. Le Pasteur avait fait venir successivement des facteurs d’orgues allemands et américains pour l’examiner. Chacun d’eux avait conclu qu’il était irréparable, que la seule solution était d’en acheter un nouveau. Sans mettre le Fr. Delfin au courant de ces expertises précédentes, les protestants lui demandèrent de réparer leur orgue.

Convaincu qu’un orgue peut toujours être réparé, le Fr. Delfin se mit au travail, découvrit la source des bruits anormaux et y porta remède, démonta tous les tuyaux, tout le coffre... Avec de l’ingéniosité, son expérience et beaucoup de temps, il arriva à un parfait résultat. Le Pasteur protestant, qui était fils d’un facteur d’orgues, directeur d’une fabrique d'orgues en Amérique, en fut tellement étonné et satisfait qu’il se mit à pousser des exclamations. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’il avoua au Frère qu’il lui avait jusque-là caché les opinions négatives des divers experts qui avaient jugé cet orgue irréparable.

Autre restauration mémorable. L’église Saint Eugène de Port-Saïd avait un très vieil orgue mécanique datant des années 1800, construit à Pistoia en Italie, qui restait silencieux depuis des années. Selon la méthode ancienne il requérait toujours un employé pour actionner la soufflerie afin de faire naître les sons. Or nul ne supportait plus ce service de souffleur. Le Frère décida de mettre un ventilateur électrique. En faire venir un d’Europe demanderait beaucoup de temps. Plein d’imagination le frère alla visiter le chantier naval de Port-Saïd. Dans les ateliers de ce chantier il trouva des machines aptes à être transformées en ventilateur électrique. En dix jours il réussit ce travail. Le jour de l’inauguration de l’orgue une foule est venue écouter cet instrument, muet depuis si longtemps, que les jeunes n’avaient jamais entendu.

À Ismaelia, encore en Égypte, le Frère put restaurer un orgue assez extraordinaire. Lorsque Ferdinand de Lesseps avait percé le canal de Suez, une église avait été construite en 1864 pour les ouvriers travaillant à ce chef-d’œuvre. Un franciscain français, le P. Bernard d’Orléans, en avait été le premier responsable et avait fait venir un orgue magnifique construit en France. Son caractère spécial c’est qu’il pouvait jouer en l’absence d’un organiste, grâce à des rouleaux perforés, selon une ancienne technique de boîtes à musiques. Une armoire était pleine de ces rouleaux qui représentaient un répertoire étonnant. Après des réparations nécessaires, tout put fonctionner à la perfection. Ce fut une joie pour le Fr. Delfin d’entendre la musique de ces rouleaux automatiques. Ils mettaient même en branle automatiquement le carillon du clocher de l’église.

Une restauration difficile fut celle d’un petit orgue de l’église de Saïda au Liban. En 1966 le P. Fidele Doman, supérieur de Saïda, demanda à la Custodie de faire venir le Fr. Delfin pour inspecter et restaurer un orgue qui ne servait plus depuis longtemps. De belle apparence, il était tellement vicié à l’intérieur que le Frère décida de le faire venir à l’atelier de Jérusalem. Or quand il était arrivé à Amman en Jordanie, et qu’il était déjà chargé sur un camion pour être transporté à Jérusalem, survint la guerre des six jours de 1967. La frontière était fermée. Il fallut faire revenir l’orgue au Liban, l'embarquer à Beyrouth pour Limassol (Chypre) et, de là, le faire embarquer de nouveau pour un port d’Israël, afin qu’il arrive à Jérusalem. Totalement restauré, il n’est pas retourné à Saïda. Il est demeuré assez longtemps dans l’atelier de Saint Sauveur où beaucoup sont venus le voir. Actuellement il est exposé au Centre d’Information Chrétien de la Porte de Jaffa, près de la Tour de David, où sont donnés de temps en temps des concerts de musique ancienne. Il fait l’admiration des assistants. Le Frère répara aussi l’harmonium de l’église de Saïda.

Le livret relate l’importante restauration de l’orgue de l’église Saint Sauveur de Jérusalem. De 1962 à 1968 ce fut un long travail. L’orgue avait été construit à Turin en 1910 ; il avait 37 jeux et 3 claviers. En 1929 on avait remplacé les pédales, pour l’alimentation en air, par un ventilateur à gasoil.

Mais un phénomène étrange se produisait depuis lors. Dès que l’organiste posait ses mains sur un clavier, toute l’église se remplissait d’une odeur de pain frais. Nul ne savait pourquoi. Le Frère Delfin découvrit que l’air aspiré par le ventilateur venait de la boulangerie de Saint Sauveur et il réalisa évidemment la transformation nécessaire ; puis, au long de six années de labeur, il fit de multiples améliorations, à tel point que cet orgue est maintenant considéré comme le meilleur de tous ceux de l’État d’Israël. Ce fut affirmé par des techniciens et par la Presse à l’occasion d’un concert de musique classique donné le 29 avril 1977 par un organiste de renommée internationale Martin Guenther Foerstmann, professeur au Conservatoire de Hambourg, invité par radio-Israël ; ce concert attira de nombreux juifs de Tel-Aviv et de tout le pays, à tel point que l’église Saint Sauveur, pourtant grande, fut trop petite pour l’assistance. »

(n° de novembre 2001, p. 322-325)

 

« Les grandes orgues de l’église Ste Catherine de Bethléem :

L'église Sainte Catherine d’Alexandrie se situe aux côtés de la basilique de la Nativité de Bethléem. C’est un sanctuaire de l’Église catholique. Il communique avec la basilique à la fois par un corridor qui y donne accès et par les grottes souterraines. Chaque année, la messe de minuit, télédiffusée à Noël à travers le monde, a fort bien identifié ce sanctuaire. Cette année, à Noël 2003, on a pu entendre le nouvel orgue Reiger, dans l’accompagnement des chants liturgiques et dans des pièces musicales qui créaient une ambiance de fête. L’orgue devait être inauguré en 2002 Mais, à cause du siège de la basilique, la cérémonie fut différée. Lors de l’aménagement de l’église pour l’année 2000, voici que l’orgue de 1978, renouvelé et construit par le regretté Fr. Delfin Fernandez, ofm, à cause des réparations qui s’imposaient, a dû être remplacé. Un facteur d’orgues d’Autriche, Reiger, fut choisi pour dresser les plans et pour construire le nouvel instrument. Ce même facteur d’orgues avait déjà pourvu le Saint-Sépulcre de puissantes orgues, en 1982. Les fabricants ont d’abord envoyé sur place des représentants chargés de dessiner le projet et de faire les plans. On avait d’abord songé à placer l’orgue au complet, buffet et console, dans le chevet du sanctuaire. Mais l’espace était insuffisant. Une section du buffet de l’orgue serait donc placée sous la grande fenêtre, dans l’abside de l’église, tandis que la plus grande partie prendrait place dans la galerie, placée au-dessus du portique qui donne accès à l’église. L’installation avait débuté en mars 2002. Elle fut interrompue avec l’invasion des occupants palestiniens, en avril de la même année. Suivirent les 39 jours de siège. Des Palestiniens y laissèrent leur vie et la grande partie des tuyaux de l’orgue furent ou brûlés ou fondus par le feu qui éclata dans la salle paroissiale, où ils avaient été remisés. Durant un affrontement qui dura deux nuits, les soldats israéliens y lancèrent de 3 à 4 bombes incendiaires. Par bonheur, les parties de l’orgue déjà installées dans l’église furent indemnes. En juin 2002, les constructeurs revinrent d’Autriche pour finir l’installation. Bien que l’orgue du chevet de l’église fût encore incomplet, il fut relativement facile de le mettre au point et de pouvoir l’utiliser.

L’orgue de l’abside peut fonctionner soit à partir de la grande console qui est amovible ou de la petite console fixée sous le grand vitrail du chevet du sanctuaire. Il possède 15 registres. Le clavier de la petite console fonctionne avec la technique « tracker ». Les orgues de ce type traditionnel d’action requièrent plus d’énergie pour frapper les touches. Par ailleurs, on a alors un sens plus aigu de la maîtrise de l’instrument et l’expression des sentiments affleure plus aisément. Pour ce qui est du grand orgue de la galerie de la façade, il ne fut pas possible aux artisans de terminer les travaux, avant que de nouveaux tuyaux soient fabriqués. A cette fin, il fallait transporter tous les outils en Autriche, au lieu de fabrication. Enfin on a pu terminer l’installation pour Noël 2003. L’orgue principal a 37 registres. L’ensemble des deux divisions totalisent 3 443 tuyaux. Il possède les dernières technologies modernes. Sa mémoire peut emmagasiner 758 enregistrements. Comme dans les orgues modernes, les touches du clavier sont très sensibles et ne requièrent aucun effort de la part de l’organiste.

Le but poursuivi dans la construction de cet orgue, c’était de prendre en compte les besoins et les désirs des gens qui visitent la Terre Sainte autant que de permettre le rendement d’un large éventail de pièces d’orgue. Donc l’orgue est polyvalent. Ce dernier souci n’est pas tant le fait de l’art du facteur d’orgue que de ceux qui s’efforcent de moderniser la liturgie : organistes, chantres, directeurs de chorale et autres musiciens, quand ils assument leur fonction ministérielle. »

(n° de juillet 2004, p. 206-208)

Le grand buffet de l'orgue, à la galerie du portail et le petit buffet, dans l'abside de l'église
(in Terre-Sainte, juillet 2004, p. 207-208) DR.

Frère Georges Lewett, organiste de Bethléem, près des deux consoles de l'orgue de Sainte-Catherine
(in Terre-Sainte, juillet 2004, p. 206) DR.

 

 

Annales de la Mission de ND de Sion en Terre-Sainte :

 

« Bonne nouvelle ! Vienne nous fait un précieux cadeau. Un simple curé autrichien nous envoie un orgue d'église et d'autres souscripteurs se sont chargés des frais d'emballage et de transport. Cet envoi arrive d'autant plus à propos, qu'il y a ici, en ce moment, et par extraordinaire, des artistes du premier mérite, occupés à monter les grandes orgues de la cathédrale que Mgr le Patriarche a fait venir. »

(n° du 1er décembre 1891, p. 4-5)

 

« Le peintre a beaucoup à faire, et nous attendons avec impatience les vitraux et l'escalier tournant qui doit conduire à la tribune du grand orgue.

Quoi ! un grand orgue à Saint-Pierre. Vous n'y pensez pas ! Non assurément. C'est un rêve que nous n'avions jamais caressé ; mais la bonne Providence s'est chargée d'inspirer, à cet effet, un de nos jeunes et généreux amis, et tandis que les ouvriers de la Maison Mader et Cie de Marseille travaillaient, avec un zèle et une habileté rares, à la pose du magnifique instrument de l'Ecce-Homo, quatorze caisses monumentales, péniblement traînées par de pauvres mulets hors d'haleine, faisaient leur entrée triomphale dans la cour de notre Maison de Saint-Pierre, au grand ébahissement de ses habitants, peu habitués à de si imposantes visites. En ce moment, on met la dernière main à l'oeuvre ; et dans quelques jours, nous pourrons entendre les sons harmonieux du roi des instruments. »

(n° du 1er décembre 1893, p. 38-40)

 

« Nouvel orgue au Saint-Sépulcre :

On a placé, durant le dernier trimestre, un second orgue dans la basilique du Saint-Sépulcre. Un motif de prudence nous a obligé de passer ce fait sous silence, car la communauté grecque non unie faisait tous ses efforts pour s'opposer à celte installation. Alors même qu'elle fût chose accomplie, les Grecs, sous prétexte de violation du statu quo ont tout tenté pour obliger à l'enlever ce bel instrument. Les ressorts de la rouerie et de la diplomatie ont été mis en œuvre ; on a essayé de gagner à cette cause et les autorités locales et les autorités supérieures ; mais, grâce à l'intervention du consulat de France, les droits des RR. Pères Franciscains ont été respectés. Les règlements n'interdisent pas d'introduire de nouveaux meubles, s'ils sont nécessaires à l'exercice du culte public, pourvu toutefois qu'ils n'adhèrent pas au mur et puissent être transportés l'un endroit à un autre. C'était bien le cas pour l'objet en litige. Après bien des pourparlers, les RR. Pères ont fini par persuader au gouvernement qu'ils ne s'étaient absolument procuré qu'un meuble de plus, bien que ce fût un meuble parlant ; et que ce meuble, si la nécessité le demandait, pouvait être aisément démonté. Que de chicanes ridicules, que de vexations mesquines, le plus souvent pour bien peu de chose !

Le nouvel orgue est placé au premier étage, dans la galerie droite qui fait le tour de la rotonde au milieu de laquelle on vénère le saint tombeau du Sauveur, il sort d'une des meilleures maisons de la Silésie autrichienne et compte douze jeux Aux jours des grandes solennités, les voûtes de l'Anastasie pourront désormais retentir des beaux accords de la musique religieuse, taudis que l'ancien instrument, insuffisant à tous les points de vue, et trop éloigné du saint édicule, ne se faisait que difficilement entendre.

Aujourd'hui que l'affaire est terminée, nous n'avons plus de raison pour nous taire, et nous félicitons les Fils de saint François qui, une fois de plus, ont voulu procurer la gloire de Dieu, en donnant plus d'éclat aux majestueuses cérémonies de la sainte église. »

(n° du 1er mars 1897, p. 28-30)

 

« Nous ne saurions passer sous silence la présence, dans la caravane, de M. Félix Beiler, facteur d'orgues de Lucerne ; informé que l'orgue de l'Ecce Homo avait besoin des soins d'une main expérimentée, il lui consacra tous ses moments libres, avec un dévouement inspiré par la plus délicate charité. Grâce à M. F. Beiler, notre orgue a retrouvé ses premiers sons, et contribue de nouveau, par ses harmonies, à élever les âmes vers Dieu. »

(n° du 1er juin 1898, p. 51)

 

Saint-François et la Terre-Sainte  (écho mensuel de la Custodie franciscaine de Terre-Sainte) :

 

« Jérusalem :

La fête de saint Jean a été magnifiquement célébrée au lieu même de sa naissance, à Ain-Karem. Les nouvelles orgues ont été inaugurées à cette solennité ; l’orchestre franciscain de Saint-Sauveur et son habile organiste ont donné un éclat splendide à la journée du 24 juin. »

(n° du 1er mai 1896, p. 186-187)

 

« Il nous est revenu de France, une nouvelle assez curieuse mais qui peint bien le genre en vogue quand il s’agit de parler des « choses de Jérusalem. » Nous citons Le Pèlerin du 24 janvier, p. 7 :

 

« Question de son. — Une autre chinoiserie se passe au Saint-Sépulcre. Les Pères de Terre-Sainte qui avaient un orgue dans la chapelle de Sainte-Madeleine, ont éprouvé le désir d’en mettre un second dans la galerie qui leur appartient. »

 

Où est la chinoiserie ? Le spirituel Pèlerin ne le dit pas. Le lecteur est libre de penser que les Pères de Terre-Sainte sont vraiment par trop imprudents d’avoir a « éprouvé le désir » de mettre un second orgue, lorsqu’ils en ont déjà un ! Les commentaires peuvent aller leur train, la nouvelle est si bien lancée : « Question de son ! »

 

Or, il y a deux ans, l’orgue de Sainte-Madeleine avait besoin d’un nettoyage complet et de réparations urgentes. Le statu quo, d’après les Grecs, s’opposait à cette réparation. Rien cependant ne devait être changé ni modifié dans l’emplacement incontesté de l’orgue ou dans le nombre des tuyaux. Que le lecteur ne soit pas surpris ! Après l’incendie du Saint-Sépulcre, en 1808, les Grecs se sont emparés de tout ce qu’ils ont pu et malgré toutes les constatations de nos droits, ils conservent encore la situation prépondérante qu’ils ont acquise alors. Bien plus, ils s’opposaient au rétablissement de l’orgue brûlé. N’ayant pu réussir sur ce point, ils se rabattent sur un autre : les grands registres doivent être retirés sous prétexte que leur son peut faire crouler la coupole (1827) !...

 

Il fallait donc chercher un arrangement avec les Grecs sur la base du do ut des. Les Latins permirent aux Grecs la réparation de petites cassettes placées en un lieu contesté et les Grecs consentent à la réparation de l’orgue en un lieu reconnu propriété des Latins. L’orgue est réparé, mais les Grecs transforment en garde-robe les petites cassettes en question. — Chose curieuse, Le Pèlerin ne souffle pas mot de cette situation : les faits sont assez récents, deux ans à peine !

Quoi qu’il en soit, la réparation hâtive n'a pas enlevé à l’orgue tous ses défauts, l’humidité du lieu ne fait que les augmenter. Les Pères de Terre-Sainte ne savaient plus comment arriver à avoir un instrument digne du culte divin, digne du Saint-Sépulcre. Le Pèlerin a peut-être raison d’appeler cette situation pénible pour les religieux, une chinoiserie : elle explique, en tous cas, comment les Pères de Terre-Sainte « ont éprouvé le désir » d’avoir un second orgue.

 

Un facteur d’orgue d’Allemagne à qui nous montrions les défauts du grand orgue de Sainte-Madeleine et les difficultés de la situation, s’offre à donner au Saint-Sépulcre un instrument suffisant pour les fonctions du culte. L’offre est acceptée et l’orgue est placé dans une galerie appartenant aux Latins, c’est-à-dire en dehors de toutes revendications possibles. Poursuivons la citation du Pèlerin : « Protestation des Grecs qui y voient une violation du statu quo. »

Le statu quo ! Un drôle de nom couvrant parfois bien des choses. Ecoutons d’ailleurs ce qu’en disait Le Pèlerin (février 1893) :

 

« Le calme complet qui s’était fait, pendant plus d’un an, dans les églises du Saint-Sépulcre et de Bethléem, vient d’être troublé par quelques petits incidents insignifiants en eux-mêmes, mais toujours grossis par la situation délicate des diverses communions qui se partagent la jouissance de ces augustes sanctuaires. C’est une fente de la toiture réparée par les Grecs, « c’est un pavé mouillé et frotté par un Latin, là où les Arméniens ont le droit exclusif de lavage : c’est une couche de chaux passée par les Arméniens dans une chapelle du Saint-Sépulcre. Tout cela amène des protestations, des échanges de lettres entre les diverses autorités, des enquêtes, etc., pour aboutir toujours à la même solution. Maintenons le statu quo. »

 

Tous ces « petits incidents insignifiants, » Le Pèlerin devrait le savoir, sont des revendications du droit de propriété dont les Latins ont été dépossédés par la violence. Les faits récents auxquels le Pèlerin l'ait allusion — sans le dire expressément, — est la perte pour les Latins du droit de nettoyer la porte nord de la grotte à Bethléem. Un de nos sacristains a été sur le point d’être assommé, c’est un « petit incident insignifiant. » Le droit de nettoyer une chose, en assure la propriété en ce pays : les Latins avaient donc raison d’y tenir comme consécration de ce droit de passage de sainte-Catherine à l’escalier nord. La protestation des Latins contre l’acte de violence des Arméniens, a eu comme résultat une décision du gouvernement local autorisant les Arméniens au nettoyage de la porte nord. Le jour où les Grecs et les Arméniens entendus ensemble, fermeront au clergé latin la porte nord de l’escalier nord, le Pèlerin se rappellera la protestation faite à propos du nettoyage : il se rappellera peut-être aussi la désinvolture avec laquelle son correspondant particulier parle de ces « petits incidents insignifiants » sans en montrer la conséquence. Poursuivons, c’est le bouquet :

 

« On prouve que l’orgue nouveau est un meuble qui ne tient ni au mur, ni au pavé, et que le statu quo n’est pas violé de ce chef. Reste le son. Le son de l’orgue nouveau est-il, oui ou non, une violation des usages établis et consentis dans la basilique ! La question a été portée à Constantinople. »

 

C’est en effet, juste ainsi que le Rme P. Custode a répondu à une protestation faite par le patriarche grec. Comment le Pèlerin a-t-il su se rencontrer mot pour mot avec la communication officielle du P. Custode ? Est-ce là la « chinoiserie » qu’il voulait annoncer, ou bien est-ce une application des rayons X ? En tous cas, puisqu’il est si bien renseigné, il aurait dû faire connaître à ses lecteurs la manière dont le patriarche grec qualifie l’inauguration de ce nouvel orgue, quand il proteste contre « les procédés violents des Latins. » Le Pèlerin avait là une occasion magnifique d’exercer son esprit en rapprochant cette parole des faits graves survenus à Bethléem le 6 janvier. Lui si bien renseigné, il n’a dit mot de ces faits récents dont la portée ne doit pas échapper, ce semble, à son correspondant. Y aurait-il là-dessous une « chinoiserie » d’un nouveau genre ? Nous examinerons aussi comment il parlera — s’il le fait, — de l’incident de Gethsémani, 10 février. Toutefois ne serait-il pas temps d’être plus sérieux et plus vrai, quand on touche aux questions qui ont droit au culte ou à la garde des Lieux-Saints ?

 

Les lecteurs du Pèlerin penseront in petto, à l’imprudence des Pères de Terre-Sainte ; plus tard — on commence déjà, — on en parlera tout haut sans s’inquiéter de contrôler les faits Le Pèlerin songe-t-il vraiment à toute la responsabilité qu’il encourt devant ses lecteurs et devant l’Eglise, en grossissant à plaisir certains faits et en taisant ceux qui parlent d’eux-mêmes, mais qui sont contre sa manière d’envisager ce qui se passe aux Lieux-Saints ? »

(n° du 1er mai 1897, p. 566-569)

 

« A Saint-Jean dans ta Montagne, grâce aux aumônes spéciales venues d’Espagne, l’église est restaurée avec adjonction d’un nouveau chœur pour les Religieux ; un orgue, un clocher et quatre cloches. »

(n° du 1er mai 1897, p. 103)

 

Collecte : Olivier Geoffroy

(avril 2024)


 

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