Musique liturgique : quelques abus



 

 

Les organistes paroissiaux dotés de connaissances liturgiques suffisantes constatent que certains abus ou incongruités dans le choix des chants ou dans leur mise en œuvre restent fréquents en dépit des nombreux articles publiés sur le sujet et des formations organisées par les services diocésains de musique liturgique. En voici quelques-uns avec des propositions de corrections.

 

Prière pénitentielle :

 

Il convient de respecter l'une des formules proposées (« Je confesse à Dieu », aspersion, invocations...) sans les remplacer, comme on le voit parfois, par un cantique de pénitence qui ne suit pas le texte liturgique.

 

 

Gloire à Dieu : Cette hymne est normalement faite pour être chantée. Dans ce cas, il faut prendre une mise en musique qui respecte le texte liturgique dans son intégralité et éviter de « saucissonner » le chant par un refrain intercalé entre les strophes.

 

 

Psaume : Il convient de prendre le psaume du jour (et non un cantique, si beau soit-il), de choisir une antienne qui correspond au caractère du texte. Qu'il soit lu ou psalmodié, l'assemblée ou le choeur peuvent chanter le refrain entre les versets ou avant et après le psaume.

 

 

Alleluia : A ne pas remplacer par un cantique de louange et à faire durer le temps de la procession de l'évangéliaire.

 

 

Je crois en Dieu : Certains refrains discutables sur le plan théologique sont employés à la place du Credo alors que le symbole de la foi est ce qui garantit l'unité de l'Eglise et permet une célébration authentique de la foi. On pense ici à certains refrains puérils comme « Je crois en Dieu qui chante et qui fait chanter la vie » (L169). De temps en temps, chanter le Credo en grégorien permettrait d'en maintenir la musique dans les mémoires et participerait à la transmission aux nouvelles générations de ce patrimoine musical irremplaçable.

 

 

Le « Sanctus » : Ce chant exige solennité et ampleur. Les refrains sautillants sur des rythmes de samba ne conviennent guère à la dignité qu'il doit revêtir.

 

 

La doxologie : C'est par les mots prononcés ou chantés par le prêtre : « Par Lui, avec Lui et en Lui etc. » que se termine la Prière eucharistique. L'assemblée n'a pas à les prononcer ou les chanter avec le célébrant mais doit seulement répondre : « Amen ».

 

« Dans les célébrations liturgiques, chacun, ministre ou fidèle, en s'acquittant de sa fonction, fera seulement et totalement ce qui lui revient. » (Concile Vatican II, La Sainte Liturgie, principes généraux de restauration, 28)

 

 

Le Notre Père et ses « paraphrases » : Le terme « paraphrase » désigne ces chants de l'Ordinaire ou les prières officielles, dont le texte n'a normalement pas à être modifié, et qui subissent des altérations au gré des « compositeurs ».

 

Ainsi en va-t-il du Notre Père qui, lorsqu'il est chanté, se trouve parfois agrémenté d'une « farce » (dans les deux sens du mot) :

« Notre Père qui es aux cieux, Ô Dieu [odieux ?] notre Père

Que ton nom soit sanctifié, Ô Dieu notre Père, Alleluia etc. »

(Notre Père « du Burkina Faso », D 375, Raymond Fau)

 

Parfois le célébrant omet de réciter l'embolisme, la prière qui suit le Notre Père, ce qui n'est pas permis.

 

 

L'Agneau de Dieu : Ce chant est destiné à accompagner la fraction du pain par le prêtre (et non, stricto sensu, le « geste de paix », par ailleurs facultatif). Il convient donc de ne pas le prolonger outre mesure et de respecter le texte liturgique sans le remplacer par un cantique mièvre et sirupeux (comme « La paix, elle aura ton visage », SE 067).

 

 

Le « chant final » : L'Ordo Missae ne prévoit pas de chant final dans la célébration eucharistique. En effet, il paraît curieux d'entendre le prêtre s'adresser en ces termes à l'assemblée : « Allez dans la paix du Christ » et de retenir les fidèles pour chanter un dernier chant. Toutefois, un chant d'envoi peut remplacer une pièce d'orgue lors de la sortie des fidèles mais il est, dans ce cas, interprété par le choeur paroissial et non par l'ensemble de la communauté. Il convient de faire preuve de souplesse au sujet de cette règle, sans toutefois systématiser l'emploi d'un chant final qui rompt le rythme de la célébration.

 

« Le gouvernement de la liturgie dépend uniquement de l'autorité de l'Eglise. […] C'est pourquoi, absolument personne d'autre, même prêtre, ne peut, de son propre chef, ajouter, enlever ou changer quoi que ce soit dans la liturgie. » (Concile Vatican II, La Sainte Liturgie, principes généraux de restauration, 22, 1-3).

 

Certains membres d'équipes liturgiques (dont on rappelle qu'elles n'ont aucun fondement canonique) déplorent que la messe n'accorde pas une place suffisamment importante à la Vierge Marie et réclament un chant marial à la fin de la célébration. Et pourquoi pas un chant à l'Esprit-Saint ou au saint patron de la paroisse, dans ce cas ? Si la Vierge Marie est à l'honneur lors de certaines messes (fête de l'Assomption, par exemple) et citée dans la Prière eucharistique, il faut savoir qu'au cours de la célébration eucharistique, le prêtre agit « in persona Christi » et la prière est tournée vers Dieu le Père.

 

A propos du « Je vous salue, Marie », celui-ci n'est pas épargné par les paraphrases :

« Et Jésus votre enfant est béni [au lieu de « Le fruit de vos entrailles »]

[…] Maintenant et à l'heure de notre mort, Amen, Amen, Alleluia » (IEV 14-17)

 

De façon générale, lorsque les acteurs de la célébration ou les personnes chargées d'établir le programme de chants ont un doute, on ne peut que leur conseiller de se référer à la Présentation générale du Missel Romain que l'on peut acheter dans une traduction française ou trouver en ligne :

http://www.vatican.va/roman_curia/congregations/ccdds/documents/rc_con_ccdds_doc_20030317_ordinamento-messale_fr.html

 

Olivier Geoffroy

(2004)

 

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