Elisabeth Havard de la Montagne (1927-1980)
Le 1er octobre 1927, à une heure du matin, vient au monde Elisabeth Marie Thérèse. Cela se passe à l’hôpital d’Argenteuil (Val-d’Oise), alors situé 5 rue Pierre-Guienne2. René et Gabrielle Sedant, ses parents, occupent à cette époque un appartement situé au numéro 66 du Boulevard Héloïse où ils sont installés depuis septembre 1923. Ce modeste immeuble ancien est construit à l’emplacement de la célèbre abbaye des Bénédictins, où logèrent rois et reines de France, nobles et grands seigneurs. La malheureuse Héloïse, qui avait épousé secrètement son précepteur Abélard sur lequel le chanoine Fulbert exerça une horrible vengeance, en devint abbesse de 1123 à 11293... La musique était un art déjà pratiqué depuis plusieurs décennies dans cette famille.
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Séraphin Sedant (1861-1902), directeur de la fanfare de Neufchâteau.
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Séraphin Sedant (1861-1902), le grand-père d’Elisabeth avait longtemps dirigé la fanfare municipale de Neufchâteau (Vosges). L’un de ses grands-oncles, Pierre Sedant (1859-1895), rentré aux Missions Africaines de Lyon en juillet 1880, ordonné prêtre 4 ans plus tard et devenu missionnaire à Lagos, au Bénin4, était très féru de musique :
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Pierre Sedant (1859-1895), prêtre des Missions Africaines de Lyon, organiste et chef de choeur à Lagos.
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il enseignait notamment le chant à 120 élèves d’une école de Lagos, donnait des leçons d’harmonium, s’occupait de la Chorale des Jeunes gens Catholique de Lagos qu’il avait fondée en 1885 (pupitre de basses et de ténors), et en outre était l’organiste de l’église de Lagos5. L’une de ses tantes, Jeanne Sedant (1888-1931) jouait du violon... dès l’âge de 4 ans ! Une autre, Rose Sedant (1894-1989), religieuse des Petites Soeurs de l’Assomption, ardente missionnaire en Amérique latine durant 46 ans, (Buenos-Aires, Montevideo, Cali, Manizalès, Caracas), avait également quelques dispositions pour la musique.
René Sedant (1890-1991), organiste,
maître de chapelle, en militaire
durant la première guerre mondiale.
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Cantilène (extrait) composée en février 1917 par René Sedant alors élève lieutenant à l'Ecole de guerre de Joinville. La dédicataire est sa marraine de guerre.
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Carte d'organiste de la basilique d'Argenteuil délivrée le 22 novembre 1925 à René Sedant.
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Basilique Saint-Denys d'Argenteuil construite en 1864.
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Enfin, un oncle, Pierre Sedant (1899-1994), professeur dans l’enseignement privé pendant 45 ans, aimait toucher l’orgue ou l’harmonium, puisqu’il tint notamment les claviers de l’orgue de l’église de l’Annonciation à Lyon, au début des années vingt, puis ceux de l’église Sainte-Perpétue, à Nîmes, au cours des années trente. Mais c’est principalement son père, René (1890-1991), qui l'initia dans cet art si magnifique. Ancien élève des petits séminaires de Châtel-sur-Moselle (Vosges)6 et de Saint-Colomban à Luxeuil-les-Bains (Haute-Saône), il fut organiste de Saint-Loup à Châlons-sur-Marne7, de l’Annonciation à Lyon8 et durant plus de 50 ans, maître de chapelle et organiste de la basilique Saint-Denys d’Argenteuil (Val-d’Oise)9. En outre, M. Sedant fut un proche collaborateur de l’abbé Henri Delépine, maître de chapelle de la cathédrale d’Arras, puis directeur des Chanteurs de la Sainte-Chapelle à Paris, fondés en 192410...
Elisabeth ne put échapper à une telle hérédité dominante, où les " gènes artistiques " se transmettent de génération en génération! D’ailleurs, sa sœur aînée, Geneviève Sedant-Ragon, fut également organiste à Argenteuil (Val-d’Oise), puis à Saint-Brice-sous-Forêt (Val-d’Oise) et au Raincy (Seine-Saint-Denis)11 et son frère Bernard Sedant (1925-1987) potier d’art à Saint-Leu-la-Forêt (Val-d’Oise). De même, à la génération suivante, on retrouve toujours cette passion pour la musique : Béatrice Havard de la Montagne, la fille aînée d’Elisabeth, est actuellement professeur de piano à Carcassonne. Enfin et pour prouver cette hérédité, mentionnons qu’à la cinquième génération, l’une des petites-filles d’Elisabeth, Marie-Cécile Havard de la Montagne, fait preuve de sérieuses dispositions pour le piano...
Elisabeth commence ses études générales à l’Ecole Notre-Dame d’Argenteuil et les poursuit à l’Institution Sainte-Geneviève d’Asnières (Hauts-de-Seine). Son goût pour la musique se fait rapidement sentir. Elle a également quelques dons pour le dessin. C’est son père qui lui donne ses premières leçons de musique. La famille Sedant habite alors dans une maison située 72 avenue Foch à Argenteuil, face à l’ancienne caserne des pompiers12, où trône en bonne place dans le salon un beau piano droit, sur lequel est monté un pédalier afin de pouvoir étudier l’orgue13. Elisabeth voulait en effet très tôt devenir organiste. Elle avait été rapidement captivée et conquise par la sonorité de cet instrument qu’elle avait découvert petite fille, sagement assise sur le banc de l’orgue, aux côtés de son père qui l’emmenait parfois à la tribune de l’église d’Argenteuil. Toute sa vie d’ailleurs, elle manifestera son profond attachement à la musique sacrée et à la belle liturgie... A peine adolescente elle a déjà fait sienne cette métaphore de Saint-Saëns écrite quelque vingt ans auparavant dans son Ecole Buissonnière : " ... l’orgue est plus qu’un instrument : il est un orchestre, une réunion de flûtes de Pan de tout calibre, les unes minuscules comme des jouets d’enfant, les autres gigantesques comme des colonnes de temple ; chacune constitue ce que l’on appelle un jeu d’orgue. Le nombre en est illimité... " Elle aurait pu facilement écrire ces lignes d’Henri Sauguet14 :
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Grand orgue de la basilique d'Argenteuil construit en 1867 par le facteur Suret - (photo Cécile de Courcy) -
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" L’orgue ! Le rêve de ma jeune existence. Dès mon plus jeune âge, ses amples sonorités, venues des voûtes des sanctuaires qu’elles emplissaient, comme issues du ciel même, le mystère de cette musique qui sortait de ces tuyaux si parfaitement ordonnancés, sans que soit visible le musicien qui délivrait ces harmonies enchanteresses, me plongeaient dans une excitation extatique qui faisait frissonner tout mon corps et m’emplissait l’âme. L’orgue et les cloches me jetaient dans une sorte de délire. A la maison j’essayais de reproduire les vagues organistes sur mon petit piano droit que je secouais d’accords majestueux et fracassants... " Cependant, trop pris par ses activités professionnelles, son père ne peut s’occuper totalement de sa formation musicale. Ainsi, notre jeune musicienne en herbe, âgée d’une dizaine d’années devient l’élève de piano d’Elisa Espejo, la mère du compositeur César Espejo15, alors domiciliée rue Lemoine-Rivière à Argenteuil, et un peu plus tard, à l’âge de 14 ans, celle d’orgue de Pierre Pavie16, organiste à Colombes (Hauts-de-Seine) et gendre d’Abel Decaux. Celui-ci, durant les 5 ou 6 années qu’il enseigna à Elisabeth insistait bien entendu sur la technique de l’instrument, mais également sur l’art d’accompagner le chant grégorien ou les choeurs polyphoniques, et sur les compétences nécessaires qu’il faut impérativement posséder afin de servir dignement l’office liturgique... Geneviève Sedant-Ragon, la sœur aînée d’Elisabeth, alors titulaire du grand-orgue Suret17 de la basilique Saint-Denys d’Argenteuil18, doit abandonner ce poste en 1944. C’est ainsi qu’Elisabeth, tout juste âgée de 17 ans, devient en octobre 1944 la nouvelle titulaire de cet instrument qu’elle connaît déjà pour l’avoir touché lors de remplacements. Elle conservera d’ailleurs ses fonctions dans cette église jusqu'à la fin de sa vie, comme nous aurons l’occasion de le voir au fil de ces pages.
Cette opportunité a sans doute été primordiale dans sa décision de se consacrer entièrement à la musique et donc d’en faire sa profession, encouragée en cela par ses parents. C’est ainsi qu’elle rentre à l’école supérieure de musique César-Franck peu après la fin de la seconde guerre mondiale.
Située alors 3 rue Jules-Chaplain dans le sixième arrondissement parisien, cette école était née d’une scission d’avec la Schola Cantorum survenue en décembre 1934. C’est en effet à la suite d’une conspiration menée par quelques musiciens aigris, avec la complicité de certains actionnaires et qui aboutit à la révocation de la direction comprenant Louis de Serres, Marcel Labey et Guy de Lioncourt, héritiers de la pensée de Vincent d’Indy qu’ils s’efforçaient de maintenir dans l’enseignement musical prodigué à la Schola, que la plupart des professeurs (49 sur 54) et même des élèves (220 sur 250) démissionnèrent et partirent fonder une nouvelle école19 : l’Ecole César-Franck ! Celle-ci ouvrit ses portes le 2 janvier 1935, tout d’abord chez M. de Froberville, 240 boulevard Raspail, puis dès le 9 mars, 16 boulevard Edgar-Quinet et enfin, en 1941, 3 rue Jules-Chaplain. Louis de Serres20 en fut le premier directeur, laissant la place en mars 1943, après son décès, à Marcel Labey21 et Guy de Lioncourt22. Ce dernier a formé une multitude d’élèves renommés dans ses classes de contrepoint (1914-1931) et de composition (1932-1934) à la Schola, ou encore dans celles de composition (1935-1955) et de déclamation lyrique (1942-1954) à César-Franck. Parmi une bonne centaine de noms citons au hasard Paule Piédelièvre, Philippe de Bremond d’Ars, Noëlie Pierront, Geneviève de La Salle, Charles Brown, Charles Pineau, Jean Pagot, l’abbé Pierre Kaelin, Eliane Lejeune-Bonnier, l’abbé Louis Aubeux, Roger Calmel, Arlette Mayer-Pize, René Béneditti ...
Lorsque Elisabeth franchit en 1946 les portes de l’Ecole César-Franck pour la première fois elle retrouve immédiatement cette chaude ambiance musicale propice à l’étude de la musique liturgique, qu’elle avait déjà pu entrevoir à l’église d’Argenteuil. Elle bénéficie là d’un enseignement très approfondi auprès de professeurs talentueux, entourée d’élèves passionnés de musique. Elle doit développer durant cette période une activité intellectuelle intense, mais néanmoins passionnante : non seulement elle est obligée de se rendre presque quotidiennement en train, puis en métro ou en bus à Paris pour suivre ses cours à César-Franck, mais également elle assure le casuel et les offices dominicaux à la basilique d’Argenteuil et de plus, dispense de nombreuses leçons de piano à quelques argenteuillais privilégiés. Ajoutons à cela que ses études à l’Ecole César-Franck réclament des heures et des heures de travail chez soi. Il n’est pas rare de la voir travailler à son piano 5 ou 6 heures d’affilée par jour au moment des examens ! Malgré tout, elle trouve encore le temps de monter des programmes vocaux de choix à Argenteuil, puisqu’elle en a également la responsabilité. Ainsi, tout en tenant les claviers de l’orgue elle dirige en même temps un ensemble vocal, plus ou moins étoffé suivant l’importance des cérémonies religieuses et même parfois renforcé d’instruments. A cette époque la vraie musique tenait une place importante dans les offices ! Cela nous est démontré par les programmes musicaux préparés et interprétés par Elisabeth. En voici quelques exemples :
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Elisabeth Havard de la Montagne, juillet 1947.
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Dimanche 13 décembre 1947 (Solennité de l’Immaculée Conception) : aux grandes orgues, paraphrase symphonique sur Ave Maria et Ave Maris Stella, à l’Offertoire; la Pastorale de J.S. Bach, à l’Elévation ; le choral Viens, Sauveur des Gentils de J.S. Bach, à la Communion ; et enfin sortie sur l’Ite missa est cum jubilo d’Edmond Dierick.
Jeudi 24 décembre 1947 (Messe de minuit) : à 23h45, offertoire sur Venez divin Messie du Chanoine Courtonne ; à 24h00, Minuit chrétien, et des chants jusqu'à la Communion. Puis la Pastorale de Franck, des chants interprétés par la Maîtrise, la Rhapsodie sur un Noël de Théodore Dubois et un Noël d’Albert Périlhou à la sortie. Vendredi 25 décembre 1947 (jour de Noël), messe du jour à 10h : Puer natus est de René Quignard (entrée) ; Messe de la Nativité de Joseph Noyon ; 3e rhapsodie de Camille Saint-Saëns (Offertoire) ; et à la Communion une pièce d’orgue de Clément Lippacher Sur des Noëls. A Vêpres et Salut solennel : un Noël de Kunc (entrée) ; une pièce de René Quignard (versets) ; et un carillon sur Adeste, du même auteur.
Dimanche 11 janvier 1948 (Grand’messe de 9h) : Messe de la Nativité de Joseph Noyon et comme morceaux d’orgue : la Seconde rhapsodie de Camille Saint-Saëns, la Marche des Rois de Pierre Gautier, et un Noël d’Albert Périlhou.
Dimanche 22 février 1948 (Grand’messe de 9h) : le Prélude sur do mineur de J.S. Bach (au grand-orgue) ; à la Communion un choral du même auteur : Je désire de tout mon cœur (éd. Durand, n°27, V) joué à l’orgue de choeur; et à la sortie au grand orgue : le Prélude et la Fugue en mi mineur. Quant à la Maîtrise, elle interprète : la Messe de Ste Angèle de l’abbé Chérion ; le Domine non secundum de César Franck, à l’Offertoire ; le Libera de l’abbé Chérion ; et le choral Tout est consommé de J.S. Bach.
Jeudi 27 mai 1948 (Première Communion). Le matin : le Grand choeur de Théodore Dubois (entrée) ; un Lied de Louis Vierne (à l’Offrande) ; la Berceuse du même auteur (à la Communion) et le Carillon de Longpont, également de Vierne. L’après-midi (de 15h30 à 17h45) : la Toccata Grand choeur de Théodore Dubois à la sortie ....
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Vendredi 8 novembre 1946, École Supérieure de Musique César-Franck, cours de chant grégorien. Notes relevées par Élisabeth.
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Ecole Supérieure de Musique César-Franck, notes d'examen obtenues en 1947 par Élisabeth. On remarque la signature de Guy de Lioncourt.
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Elisabeth reste à l’Ecole César Franck jusque 1948. Là, elle reçoit les précieuses leçons d’harmonie et d’improvisation de René Malherbe23, de contrepoint d’Albert Bertelin24 et de René Alix25, et de chant grégorien de Jean de Valois26 et de Suzanne Guillemot27. Elle suit également les cours de piano de Mme Récappé et reçoit les conseils de Paule Piédelièvre28. En outre, elle poursuit ses leçons d’orgue auprès de Pierre Pavie.
Elle a pour condisciples de nombreux artistes dont certains feront par la suite une brillante carrière musicale, parmi lesquels Annette Frappier, Bernard Bailly de Surcy, Pierre Chatton29, Simone Micheau30, Marthe Brasseur, Geneviève Gosset31, Jean-Jacques Duparc, C. de Saint-Soir, M. Braudt, Jean-Albert Villard32, Jeanne Joulain33, Elisabeth Bretschneider34, Antoinette Labye35, Ramès,.... et Denise Rouquette36, chez qui, rue Clotaire, il lui arrivait parfois de réviser ensemble les cours d’harmonisation et de fugue.
En avril 1947 et pour quelques mois, elle est réclamée par Marcel Labey dans sa classe d’orchestre, comme pianiste répétiteur. En effet l’orchestre n’étant que rarement au complet un piano est nécessaire pour assurer toutes les harmonies. Le pianiste doit alors posséder de sérieuses notions de déchiffrage, tout en restant bien entendu dans le mouvement. Lors de sa première séance, le 13 avril 1948, elle dut ainsi au pied levé déchiffrer l’Allegro et l’Adagio de la 4e Symphonie de Beethoven que Marcel Labey faisait répéter à ses élèves !...Cette même année, elle obtint ses diplômes d’improvisation, de piano, de contrepoint, d’harmonie et de chant grégorien 1er degré.
Non seulement ce passage à l’Ecole Supérieure de Musique César-Franck a profondément marqué et influencé la vision esthétique d’Elisabeth, qu’elle gardera toute sa vie dans son interprétation musicale et dans sa façon d’appréhender l’art sous toutes ses formes, mais il a également eu une heureuse conséquence ! C’est en effet là, plus spécialement en 1946 lors des cours de grégorien de Melle Suzanne Guillemot, qu’elle rencontra son futur mari, Joachim Havard de la Montagne, lui-même tout jeune élève nouvellement inscrit. D’autres couples de musiciens se connurent également sur les bancs de cette école : Simone Micheau et Jean-Albert Villard, Denise Rouquette et Michel Chapuis...
à suivre...
Denis Havard de la Montagne
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1) Voir notamment les articles " Elisabeth Havard de la Montagne " dans les numéros 4, pp. 5-19 (décembre 1981) et 5, pp. 5-14 (mars 1982); " Elisabeth Havard de la Montagne et Une Heure de Musique à la Madeleine ", n° 6 , pp. 8-15 (juin 1982) et " Elisabeth Havard de la Montagne à l'orgue ou au clavecin ", n° 8, pp. 3-29 (décembre 1982) ...
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2) Actuellement est installé à cet endroit le musée historique d'Argenteuil, dont le conservateur est notre ami Daniel Roth, de la Société Historique et Archéologique d'Argenteuil et du Parisis.
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3) Voir à ce sujet notre article intitulé La Sainte-Tunique d'Argenteuil, in Musica et Memoria, n° 14 (avril 1984) ou in Chrétiens Magazine, n° 71 du 15 mai 1994.
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4) Lagos est à présent la capitale du Nigéria. Ne pas confondre avec l'actuel Bénin (capitale : Porto-Novo), qui à l'époque s'appelait Dahomey.
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5) Le Père Sedant, après avoir étudié durant 4 années le latin à l'Ecole Apostolique d'Avignon, puis pendant 9 mois au Noviciat des Jésuites d'Arlon (Belgique), entra en philosophie aux Missions Africaines de Lyon, le 27 juillet 1880, alors âgé de 21 ans. Il prêta serment le 5 décembre, prit la tonsure le 17 décembre 1881, reçut les ordres mineurs à Noël 1882, devint sous-diacre à Noël 1883, diacre lors de la fête de la Trinité 1884 et enfin fut ordonné prêtre par Mgr Dubois le 26 juillet de la même année. Dès le 13 septembre il partait de Liverpool pour le Vicariat de la Côte du Bénin, à bord du bateau Le Mandingo. Après plus de 8 ans passés à Lagos, il devait revenir en France le 11 mai 1893 à cause de sa santé déficiente, mais repartait dans ce pays qu'il aimait tant l'année suivante, exactement le 25 juillet. Six mois plus tard, le 2 février 1895, il mourait à Lagos, peu après avoir célébré (le 25 janvier) son trente-sixième anniversaire ! Le 16 janvier 1892, dans une lettre adressée à son frère Séraphin, le Père Sedant relate ses nombreuses activités à Lagos : " ... Si tu veux savoir à quoi je m'occupe, voici : répétitions de musique chaque jour..., classes séparées, en tout 120 choristes. Catéchisme d'une heure tous les jours à plus de 100 belles du pays prêtes de marier. Quelques leçons d'harmonium, visites de malades, des chrétiens, hôpital, prison, où j'ai déjà préparé à la mort 7 païens qui ont été pendus pour avoir commis des meurtres qui tous... ont demandé à être instruits et baptisés catholiques ; préparation des sermons du Dimanche, en anglais et en portugais ; direction de la Congrégation des Enfants de Marie que je réunis tous les Dimanches ; classes de chant le soir au clair de lune aux jeunes gens sortis des écoles et qui comportent mes 2 parties de basses et de ténors, et que j'ai formés en " société " intitulée Chorale des jeunes gens catholiques ; un peu de médecine, c'est à dire pansement des plaies de ceux qui viennent se faire soigner par moi, car je suis le médecin de la Mission ; visites de mes patients pour voir l'effet de mes remèdes ; et quelques ¼ d'heure de fièvre de temps en temps. Voilà un très court abrégé de la vie que je mème il y a plus de 7 ans... " En fin de lettre il ajoute " ...Je t'envoie la photographie de l'Eglise de Lagos dans laquelle chaque Dimanche à la messe et à la bénédiction je charme les oreilles des noirs par des accords épatants que j'essaie de décrocher d'un joli harmonium du reste. Je suis le grrrrrrrand musicien de la colonie. "
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6) C'est là qu'il reçut ses premières leçons de solfège, harmonie, histoire de la musique et apprit à jouer de l'harmonium.
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7) Suppléant, en 1912 et 1913, de M. Pierrard, père du futur évêque de Châlons-sur-Marne.
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8) Accompagnateur en 1914.
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9) Du 1er janvier 1924 jusque dans les années 1970. Il succédait là à M. Fortemps, un ancien élève du Conservatoire de Liège, associé durant quelque temps à Henri Hérelle dans sa " Librairie musicale et religieuse H. Hérelle, Fortemps et Cie, éditeurs ", 16 rue de l'Odéon à Paris, et éditeur notamment de la revue de musique religieuse La Musique d'Eglise, fondée en 1922.
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10) L'abbé Delépine (1871-1956) est également le fondateur de la Procure Générale du Clergé en 1898 à Arras, transférée en 1919 à Paris, et de la Revue Sainte-Cécile. René Sedant entrait à la Procure en 1923, en devint rapidement directeur-adjoint, puis directeur général au début des années 1950. Il prit sa retraite à l'âge de 80 ans, en 1971, après s'être notamment beaucoup investi dans les éditions musicales de la Procure et dans l'administration de la revue Musique Sacrée - l'Organiste, où l'on retrouve souvent sa signature dans des numéros des années 1950-1960... Pour plus de détails sur la biographie de René Sedant, voir notre article " René Sedant, centenaire, ancien poilu et musicien ", Musica et Memoria, n° 70 (juin 1998) pages 9-32.
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11) La sœur aînée d'Elisabeth , Geneviève, fut organiste de la basilique d'Argenteuil, dès 1939, à l'âge de 17 ans, jusque 1944. En 1946, elle devint titulaire de l'orgue Suret de l'église de Saint-Brice-sous-Forêt, place qu'elle occupa jusque juin 1957. Depuis la fin de 1956, elle exerçait également à Notre-Dame du Raincy et y restera jusque décembre 1981. Cette église Notre-Dame, construite en 1922-1923 par l'architecte A. Perret était la première du genre entièrement en béton. Classée monument historique en 1989, elle dut subir une importante restauration en 1989. Elle abrite un orgue Abbey (1876), relevé par Beuchet-Debierre en 1956, de 15 jeux sur 2 claviers et pédalier.
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12) C'est le 19 juin 1930 que M. et Mme Sedant avaient acheté cette maison à Madame Auguste Mareau.
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13) Vendu par la suite, cet instrument sur lequel a longtemps travaillé Elisabeth Sedant se trouvait encore au début des années 1990 en possession de la famille Réale à Coudrée-Sciez (Haute-Savoie).
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14) Henri Sauguet " La musique, ma vie ", Paris, Librairie Séguier, 1990, 428 pages (voir p.48).
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15) Elisa Boucherant, née vers 1865, avait épousé Amador Espejo. Professeur de piano à Argenteuil, elle avait donné naissance, le 25 juillet 1892 à Malaga (Espagne), à un fils prénommé César. De nationalité espagnole, celui-ci, bien que décédé à Courbevoie (Hauts-de-Seine) le 4 avril 1988, était domicilié à Paris, dans le quinzième arrondissement. Admis à la Sacem au mois d'août 1921, César Espejo fut chef d'orchestre et violoniste dans différents orchestres, dont celui du Théâtre de Mogador (1919) et avait été reçu à l'Opéra de Paris en 1916 par concours. On lui doit une cinquantaine d'oeuvres, la plupart écrite pour violon (éditées chez Salabert), mais également quelques danses espagnoles (tango, paso doble) et un recueil de pièces pour piano édité chez Maurer (Belgique) et Noël (Paris). Chez Lemoine figurent aussi et toujours au catalogue ses 2 Pièces de style ancien et son Travail pratique des gammes, pour violon.
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16) Pierre Pavie (1905-1972), élève de Maurice Sergent et d'Abel Decaux, ainsi que du CNSM de Paris, tint durant 47 ans (1923-1970) les claviers de l'orgue de l'église St-Pierre-St-Paul de Colombes (Hauts-de-Seine). Il avait épousé Marguerite Decaux, la fille de son professeur Abel Decaux (1869-1943), un ancien élève de Massenet, Widor et Guilmant, qui enseigna également l'orgue, non seulement à la Schola Cantorum (1897), à l'Ecole César-Franck (1935) et à l'Institut Grégorien, mais également à la célèbre Eastman School of Music de Rochester (USA), où il avait succédé, en 1923, à Joseph Bonnet. Abel Decaux fut aussi organiste du Sacré-Cœur de Montmartre (1903-1923). D'une modestie excessive, Pierre Pavie n'a voulu léguer aucune de ses compositions à la postérité ! C'est ainsi qu'il détruisit notamment une magnifique Missa in honorem Sancti Petri, pour choeurs, instruments à cordes et orgue, qui avait été interprétée, entre autres, lors d'un concert à l'église Sainte-Marie-des-Vallées de Colombes, où il était aussi maître de chapelle...
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17) Voir infra, le chapitre consacré à l'histoire des orgues d'Argenteuil.
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18) Geneviève Sedant-Ragon avait succédé en 1939 à Mme Quidet, une ancienne élève de René Duhamel, organiste de l'église Saint-Aignan de Chartres et autrefois élève de l'Ecole Niedermeyer (1896-1902). Elle avait été obligée de quitter Argenteuil pour se rendre à Maintenon (Eure-et-Loir) au chevet de sa mère malade.
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19) Pour plus de précisions sur ces faits, se reporter au livre de souvenirs de Guy de Lioncourt, intitulé " Un témoignage sur la musique au XXe siècle " (Paris, l'Arche de Noé, 1956), que nous a d'ailleurs si aimablement communiqué son gendre, Jacques Berthier, voilà quelques années.
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20) Louis d'Arnal de Serres (1864-1942), élève de César Franck au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris (1885-1888), professeur à la Schola, puis successeur en décembre 1931 de Vincent d'Indy à la direction de cette école, est l'auteur de musique symphonique, de mélodies, de choeurs et de musique religieuse principalement édités chez Salabert, Rouart et aux Editions de la Schola. Il fut également un certain temps, dans le courant des années vingt, organiste de l'église catholique anglaise St-Joseph, sise 50 avenue Hoche.
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21) Docteur en droit (1898) Marcel Labey (1875-1968) fut notamment élève de composition de Vincent d'Indy à la Schola Cantorum, auquel il succéda comme directeur, en même temps que Louis de Serres. Secrétaire de la Société Nationale de Musique pendant près de 50 ans, il a laissé de la musique pour piano, des symphonies, des mélodies, un drame Bérengère... Son épouse, Charlotte Sohy-Labey (1887-1956), élève de Marty, Guilmant, Vierne et d'Indy est l'auteur de messes, mélodies, pièces pour piano, trios, quatuors à cordes, ainsi qu'une symphonie et un drame lyrique L'Esclave couronnée.
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22) Guy de Lioncourt, ancien élève de la Schola (1904-1916), où il avait eu pour professeurs Léon Saint-Réquier (harmonie), Amédée Gastoué (grégorien), Albert Roussel (contrepoint), Vincent d'Indy (composition), Charles Pineau (orgue), F. Mondain (hautbois) et Louis de Serres (déclamation lyrique), succéda à son maître Vincent d'Indy au cours de composition de la Schola, en 1932. Il poursuivit ses mêmes activités à l'Ecole César-Franck. Il a composé des drames ou contes lyriques ou liturgiques : Jean de la lune, La belle au bois dormant, Le Mystère de l'Emmanuel, Les dix Lépreux..., des cycles de mélodies, des choeurs, motets, cantiques, une Messe en si mineur, pour 4 voix mixtes, et des pièces pour orgue, ainsi que de la musique de chambre. Son catalogue comporte plus de 130 numéros d'opus. En 1912, il épousait Claire de Pampelonne, une nièce de Vincent d'Indy. L'une de leurs 4 filles, Germaine, épousa à son tour (1946) l'organiste Jacques Berthier (1923-1994), fils du fondateur de la Manécanterie des Petits Chanteurs à la Croix de Bois, et père de Vincent Berthier de Lioncourt, actuel directeur du Centre international de Musique baroque de Versailles.
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23) René Malherbe (1898-1969), ancien élève de la Schola, puis de Gigout et Dupré au CNSM, organiste de Notre-Dame-de-la-Croix, puis maître de chapelle de St-Pierre-du-Gros-Caillou à Paris, fut un fervent grégorien. Il compte également parmi ses autres élèves d'improvisation Michel Chapuis.
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24) Albert Bertelin (1872-1951) fit ses études avec R. Pugno, Th. Dubois, C.M. Widor et Massenet au CNSM. Second Prix de Rome en 1902, membre du jury des examens du Conservatoire de Paris, lauréat de l'Académie des Beaux-Arts, il est l'auteur notamment d'un Traité de contrepoint modal et tonal, ainsi que d'un Traité de composition musicale. On lui doit aussi plusieurs compositions musicales, dont un Choral pour orchestre, un opéra Goïtza, des sonates, trio, quintettes, des oeuvres religieuses, des mélodies soignées et une cantate la Légende de Lorely, pour soprano solo et orchestre, sur un poème de Maurice Chassang.
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25) René Alix (1907-1966), après des études d'orgue auprès de Marcel Lanquetuit et Louis Vierne, travailla l'harmonie, le contrepoint et la fugue avec J. Déré et G. Caussade, et la composition avec A. Bertelin. Organiste de Notre-Dame à Sotteville-les-Rouen dès l'âge de 11 ans, puis de St-Michel du Havre (1928), il devint par la suite suppléant du grand-orgue de Notre-Dame de Paris. Chef des choeurs de l'ORTF, il prit la direction de l'Ecole César-Franck, en 1955. Il a écrit des oeuvres pour orchestre, de la musique chorale et vocale, dont une Messe pour soli, choeurs et orchestre, une autre Messe matutinale a capella et un oratorio Les très Saintes Heures de Jeanne d'Arc, de la musique de chambre et instrumentale, ainsi qu'un opéra-comique Yolande.
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26) Jean de Valois (1886-1970), professeur de chant grégorien à la Schola, puis à l'Ecole César-Franck, collaborateur de plusieurs revues : La Petite Maîtrise, la Tribune de St-Gervais et Musique et Liturgie, a été organiste à St-Philippe-du-Roule (suppléant d'Henri Mulet), puis à St-Eustache (suppléant de Joseph Bonnet et d'André Marchal), avant d'être nommé, en 1938, maître de chapelle de l'église de la Madeleine. Parmi ses compositions on relève une messe ainsi que de nombreux motets et cantiques.
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27) Ancienne élève de la Schola (A. Gastoué, A. Roussel, A. Groz, V. d'Indy), Melle Suzanne Guillemot, née vers 1893, a succédé à Mme C. Jumel dans sa classe de grégorien à la Schola Cantorum avant d'exercer les mêmes fonctions à l'Ecole C. Franck.
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28) Paule Piédelièvre (1902-1964), diplômée de piano 2e degré (1918), musique de chambre (1918), contrepoint (1919), chant grégorien (1920), orgue 2e degré (1921), composition (Vincent d'Indy, puis Guy de Lioncourt, 1932) à la Schola, devint dans cette école professeur de piano dès 1922, avant de l'être à l'Ecole C. Franck. Bien que remarquable pianiste, elle était également organiste et a exercé durant de nombreuses années à l'église des Etrangers à Paris (St-Ignace). Guy de Lioncourt lui a dédié sa Fugue et fantaisie pour piano qu'elle interprétait souvent avec beaucoup de talent.
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29) Pierre Chatton, prix de composition en 1949 (classe de Guy de Lioncourt), sera par la suite directeur de la Société Motet et Madrigal à Lausanne (Suisse).
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30) Simone Micheau est actuellement organiste de l'église Ste-Radegonde à Poitiers. Elle a épousé Jean-Albert Villard (voir infra note 32).
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31) Geneviève Gosset-Brugère, prix de déclamation lyrique avec la mention très bien en 1949, a fait plus tard une importante carrière de chanteuse, particulièrement au sein des choeurs de la Maison de la Radio.
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32) Jean-Albert Villard, après avoir été accompagnateur à St-Leu-St-Gilles et à ND-des-Blancs-Manteaux à Paris, est de nos jours titulaire de la cathédrale St-Pierre de Poitiers, et ce depuis 1949. Il est également membre rapporteur de la commission des orgues classées monuments historiques et président de l'Association Henri Cliquot, fondée en 1949. Avec son épouse, Simone Micheau, ils sont les parents d'Alain Villard, également organiste.
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33) Jeanne Joulain, prix de composition en 1947 (classe de Guy de Lioncourt), 1er prix d'orgue au CNSM en 1952 (classe de Marcel Dupré) sera ensuite professeur aux conservatoires de Lille et d'Amiens, organiste à la collégiale St-Pierre de Douai, puis de l'église St-Maurice de Lille (1954).
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34) Elisabeth Bretschneider ( ? -1972), prix de composition en 1948 (classe de Guy de Lioncourt) a été organiste des églises Ste-Geneviève et ND-du-Perpétuel-Secours d'Asnières.
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35) Antoinette Labye, prix de déclamation lyrique en 1947 (classe de Guy de Lioncourt) fit ensuite une carrière de chanteuse.
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36) Denise Rouquette épousera plus tard Michel Chapuis, organiste renommé, titulaire de la classe d'orgue du CNSM de Paris (1986 à 1995).
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