Le Centre national de préparation au C.A.E.M.

 HISTORIQUE 
 LES ANCIENS 
 ANNUAIRE 


Le Centre national de préparation au C.A.E.M. était hébergé dans le Lycée Jean De La Fontaine, Place de la porte Molitor, Paris XVIe ( photos Michel Baron, 22 septembre 1964 )


La formation des professeurs spécialistes en éducation musicale, dans les lycées, collèges et écoles normales en France, n'a pas toujours été décentralisée comme elle l'est aujourd'hui. Pour passer l'examen, puis le concours du certificat d'aptitude à l'enseignement musical (C.A.E.M.) assimilé à un CAPES, on pouvait bien, si on avait bonne fortune, se préparer par cours privés. Mais hors des grands centres il était difficile de trouver les ressources pour couvrir toutes les disciplines nécessaires que nous détaillerons ci-après. Une préparation officielle était disponible à Nancy (ouverte en octobre 1964), sous la direction de Marcel et Anne-Marie Dautremer, une autre propédeutique a existé à Nice (ouverte en octobre 1961), alors que l'École Normale de Musique de Paris proposait une préparation privée: parmi les enseignants, Mademoiselle Alice Pelliot (1880-1966) alors en charge à l’ENM de la préparation au concours d'entrée du Lycée La Fontaine, pour les dictées, le solfège et l'harmonie, avec quelquefois en renfort sa fille Aline Pelliot-Pendleton (adaptatrice française de l’Orff-Schulwerk, qui fut plus tard inspectrice générale de la Musique à la direction des Affaires Culturelles). Ces préparations conduisaient principalement au concours d’entrée au Lycée La Fontaine, institution la plus convoitée: le Centre national de préparation au C.A.E.M. était surnommé dans l'usage « Lycée La Fontaine », en raison du bâtiment qui l'hébergait. Créé à l'initiative de Raymond Loucheur, en 19472, son objectif était de préparer en deux ans des candidats à un examen d'état puis, après une année supplémentaire d'études, à un concours de recrutement. La réussite à ce concours attribuait un poste de professeur certifié, à plein temps et permanent, dans l'enseignement public secondaire.

Le concours d'entrée au Centre national de préparation au C.A.E.M.

Chaque année un concours d'entrée était ouvert à toute la France pour recruter une promotion de trente étudiants. Là encore, la préparation était nécessairement basée sur des cours privés, éventuellement sous forme de cours de groupe, comme en organisaient Maurice Franck et son épouse aux Studios Pleyel. Même si dans la plupart des cas une année suffisait, le niveau d'entrée était assez exigeant : dictées polyphoniques, solfège en clés d'ut, harmonie classique impliquant la maîtrise des neuvièmes de dominante, connaissances générales en histoire de la musique. La réussite à ce concours d'entrée était pratiquement une garantie de réussite à l'examen puis au concours d'état du C.A.E.M., la totalité des étudiants admis « à La Fontaine » réussissant régulièrement ces épreuves sans grande difficulté. Les non élus au concours d'entrée devaient s'en remettre à poursuivre une préparation privée, moins stimulante et plus problématique.

Mlle Clotilde Colomb, surveillante générale au Centre nat. de prép. au CAEM
Mlle Clotilde Colomb, surveillante générale au Centre nat. de prép. au CAEM, 7 mai 1966
( coll. M-A Pech-Gougaud )

Outre le niveau d'aptitudes et de connaissances requises, il fallait à une certaine époque savoir se plier à des exigences administratives plus ou moins tracassières. Ainsi, les locaux étant situés dans ce magnifique lycée de jeunes filles du XVIe arrondissement ( la nageuse Christine Caron y suivait ses études secondaires ) certaines directions ont exigé, pour la constitution du dossier d'inscription, un certificat de moralité, pièce pourtant tout à fait inconnue dans la nomenclature administrative des établissements secondaires ! Claude Lévy nous rappelle un autre parfum de l'époque : les bulletins trimestriels des étudiants étaient envoyés à leur famille... et ceux des étudiantes mariées étaient envoyés à leur époux ! En outre, le port obligatoire de la cravate chez les étudiants mâles ( autres temps, autres mœurs : ils étaient particulièrement surveillés par Mlle Colomb ! ) a dû contribuer à un puissant effet dissuasif dans l'évolution de la mode masculine, au moins chez les professeurs de musique. Lui succéda Mme Meyer, avec qui nous pouvions prendre des respirations un peu plus profondes.

L'institution

Les locaux étaient situés dans une seule aile du 3e étage, dont le couloir était garni de bibliothèques vitrées. De longues tables accueillaient les étudiants qui voulaient apporter quelques révisions finales à leurs travaux, mais outre quelques salles de cours tout à fait normales, la description est complète. L'intérêt humain de cette institution était que chaque promotion annuelle permettait la rencontre de futurs professeurs issus de tous les coins de France. Rencontre des régions, rencontre des musiques des accents, petit choc des cultures, un peu comme au Service national mais certainement à un autre niveau. L'autre intérêt n'était pas moindre : la brochette de professeurs hautement compétents que l'inspection générale avait empruntés au CNSM de Paris pour former les futurs enseignants. On trouvera facilement, sur ce site Musica et Memoria, des notices individuelles de ces maîtres, principalement dans la section des Prix de Rome. Le coût de ces études ? Gratuites, bien entendu, mais en entrant les étudiants devaient signer un engagement à servir dans l'Éducation nationale pendant au moins une période de cinq ans après avoir passé l'examen et le concours de sortie.

  Les professeurs de disciplines musicales

Histoire de la musique et analyse : un cours de deux heures par semaine réparti, comme tous les autres, sur trois années permettait d'approfondir toutes les époques de l'histoire sous la direction de Jacques Chailley. Les œuvres analysées étaient souvent choisies en fonction de ses plus récents travaux et publications. Faisait office de répétitrice, si l'on peut dire, Paule Druilhe qui, lors d'un cours hebdomadaire d'une heure, transmettait aux étudiants son art de la synthèse. Elle était en poste également au Centre National de Télé-Enseignement.

André Vessières
André Vessières
( coll. M-A Pech-Gougaud )
Jean Giraudeau
Jean Giraudeau
( coll. M-A Pech-Gougaud )

Solfège et lecture à vue avec paroles : les futurs professeurs devaient pouvoir saisir immédiatement le caractère des textes modaux traditionnels des régions de France, mais ils devaient également pouvoir les déchiffrer directement avec les paroles. Les professeurs étaient Maurice Franck et Jeanine Rueff. Une partie des deux heures par semaine, en particulier avec Maurice Franck, était consacrée à la découverte d'œuvres méconnues du répertoire lyrique français, outre les mélodies et lieder du grand répertoire. Il ne manquait pas une occasion, non plus, de susciter des observations concernant l'harmonisation de certaines tournures musicales. L'intégration des disciplines ne date pas d'hier, mais elle n'est bénéfique à un niveau professionnel que lorsqu'elle n'est pas systématisée !

Technique vocale : ce cours fut dispensé par plusieurs sommités en ce domaine, en particulier Jean Giraudeau6, alors maître de chant à l'Opéra de Paris, Irène Joachim, qui fut la Mélisande du premier enregistrement de Pelléas, et André Vessières3. Les accompagnateurs étaient des gens tels que Catherine Brilli6, France Soudères, Jean-Claude Pennetier...

Irène Joachim en répétition
Irène Joachim dirige une répétition avec Françoise Chalençon, Catherine Saugey, Jean-Pierre Turlan, Hélène Rio et Lacrampe-Camus (novembre 1965)
( Coll. M-A Pech-Gougaud )

Chorale et direction chorale : compte tenu du haut niveau de lecture exigé même à l'entrée du Lycée La Fontaine, la chorale du Centre national de préparation au C.A.E.M. était l'un des deux ou trois chœurs en France à pouvoir exécuter - quasiment en lecture à vue - le répertoire quelque peu délicat de Debussy, Ravel, Hindemith... Elle était parfois conviée à prêter son concours lors d'enregistrements de disques. Cette classe était sous la direction de Jean Rollin, ainsi que de Roger Boutry.

Lecture à vue, harmonisation et accompagnement au piano : ce cours d'une heure par semaine était dispensé par Yvonne Desportes, auteur d'utiles publications, parmi de nombreuses autres, sur ce sujet particulier. Claude Lévy, major de la promotion 1967-1970, a pu suivre aussi ses cours d'orchestration, dans lesquels elle initiait à cette discipline un groupe d'élèves volontaires (à partir de sonates de Beethoven). Elle pratiquait cet enseignement à titre gracieux.

Harmonie : il fallait que les futurs professeurs soient à même d'écrire des arrangements instrumentaux ou vocaux dans le cadre de leurs activités auprès des élèves du secondaire. On n'était pas si loin de l'époque où l'heure de musique, dans ces établissements, s'appelait l'heure du chant ( on n'avait pas de honte à y enseigner aussi La Marseillaise ). Le Centre avait élaboré un principe d'au moins une alternance entre deux parmi trois professeurs prestigieux : Henri Challan, Marcel Bitsch et Alain Weber. Leurs pédagogies complémentaires et leurs sensibilités diverses étaient un bénéfice pour les étudiants. Chaque promotion de 30 élèves était systématiquement divisée en deux groupes de 15, mais certains cours voyaient encore ce nombre divisé en deux équipes de 7 ou 8 individus. Trois heures par semaine, pendant trois ans (après la préparation antérieure minimale d'une année), c'est ce que l'on considérait normal, à cette époque, pour donner une bonne formation d'harmonistes ( pas d'analystes ! ) à... de simples enseignants ! Il ne s'agissait pourtant pas d'un conservatoire... Dans les conceptions pédagogiques d'aujourd'hui, tous ces chiffres ont tendance à évoluer du mauvais côté, au grand bénéfice des budgets.

Dictée musicale : Cette classe était confiée à André Musson4, de la Schola Cantorum. Le suppléa plus récemment Martine Breton-Desaymard, alors jeune chargée de cours au CNSM. Sa bonne humeur, sa jovialité permettaient de surmonter toutes les difficultés pour prendre en note à quatre parties les chorals de Bach...

Mme France Strauss
Mlle Lorin
Mme France Strauss, pédagogie (à gauche) décédée en 2014, et Mlle Suzanne Lorin, littérature musicale.
( Photo X..., 1968, coll. Claudine Clairay-Bonafous )
  Les autres disciplines
Simone Cusenier, centre nat. de prép. au CAEM M. Denys
Simone Cusenier, prof. d'histoire de l'art, avril 1967
(Décédé août 2004)
M. Denys, prof. de littérature, vers 1967
( coll. M-A Pech-Gougaud )

La pédagogie était enseignée par au moins deux professeurs, par ailleurs en poste dans les classes de secondaire du Lycée La Fontaine: Mlle Jeanne Roux et Mme France Strauss (décédée en octobre 2014). C'est probablement la principale raison qui avait fait choisir un lycée pour héberger les cours du Centre de préparation : la disponibilité de classes régulières permettait aux futurs professeurs de mettre en pratique, une ou deux heures par semaine et tout au long de l'année, les principes ou projets élaborés pendant les trois heures hebdomadaires consacrées au sujet. Des cours de littérature musicale abordaient le choix des répertoires particulièrement appropriés à des présentations en classe, en fonction des programmes en vigueur.

Les autres cours dispensés consistaient en l'histoire de l'art et des civilisations avec Simone Cusenier ( deux heures par semaine ), qui savait si bien dès les cinq premières minutes démontrer notre ignorance des styles roman et gothique. C'était toutefois une manière d'appréhender l'histoire qui aurait eu intérêt à être généralisée à certains niveaux de l'enseignement public, et particulièrement au secondaire. Des cours de littérature française ( deux heures également ) abordaient des textes plus ou moins en rapport avec la musique. Paul Caubisens nous rappelle deux noms: pendant la promotion 1959-1962 André Fermigier avait la charge de ce cours de littérature. Enfin, un cours de physique du son et d'acoustique musicale (deux heures) permettait d'investiguer les principes de tous les types d'instruments, des divers tempéraments, de la réverbération, etc.  M. Georgeais était en charge de ce cours et avait fait un travail intéressant car il nous présentait les idées les plus modernes relatives à cette science ainsi que l'acoustique des instruments, ce qui ne se faisait pas beaucoup à l'époque.

Ces trois années d'études étaient ponctuées par divers concerts, en particulier en novembre le concert de la promotion finissante de troisième année, et en décembre le concert des " nouveaux ". Le Centre de préparation au C.A.E.M. avait le statut de Grande École, et ses étudiants bénéficiaient des mêmes avantages et traditions que ceux de ces institutions, comme les (douces) cérémonies du bizutage.

Mai 68 vu par
un ancien de La Fontaine
(Le Progrès, Saguenay, QC Canada)
Jean Giraudeau et sa pianiste Catherine Brilli
Jean Giraudeau et sa pianiste Catherine Brilli
( Photo X..., coll. Golgevit ) DR
Photo grand format

Surviennent les révoltes de Mai 68, rendant quelques professeurs nerveux, certains d'entre eux étant au contraire vraiment très engagés, invitant les étudiants au café en face pour leur expliquer comment pousser à la “révolution”. Les examens sont reportés, certains élèves retournent dans leurs familles en "province", attendant que l'orage passe, mais les communications avec Paris sont difficiles, la radio étant peu bavarde à propos de notre institution: on s'inquiète à propos des éventuelles nouvelles dates des examens alors qu'il y a pénurie d'essence (blocage des raffineries). À Paris, la “participation active” des musiciens aux événements de Mai 68 avait surtout lieu dans l’Institut de Musicologie où se déroulaient les assemblées générales qui décidaient de la poursuite de la grève. À La Fontaine, quelques meneurs faisaient l'appel pour inciter à participer aux "manifs", alors qu'un autre s'amusait à cacher le cahier des présences... Finalement les examens et concours eurent lieu en septembre. Bref Mai 68, tout en échauffant l'atmosphère, aura contribué à porter le coup de grâce à l'institution, comme ce fut le cas pour le Prix de Rome sous son ancienne forme de concours et mises en loge. La dernière année de recrutement à La Fontaine fut 1972, l'admission ne se faisant plus par concours. Le Centre a disparu en 1974 avec la dispersion géographique de la préparation au professorat de musique dans divers conservatoires et universités régionales, et avec le remplacement du C.A.E.M. par le CAPES. Cependant, le Lycée La Fontaine est demeuré un établissement dispensant divers enseignements musicaux proposés par l'Éducation nationale.5

Lien photos : Mai 68 au Lycée La Fontaine (3 premières photos).
Lien 2 photos : Institut de musicologie, 10 juin 1968, et suivante.

Michel Baron    

1) C’est à dire la Direction Régionale de la Jeunesse et des Sports (DRJS) en tant que Conseiller Technique et Pédagogique (CTP), où j’ai été détaché de l’Education Nationale en 1971. C’était un corps de spécialistes dans les domaines artistiques mis à la Libération par l’état à la disposition des associations d’Education Populaire. Leur mission consistait à conseiller leur Directeur Régional en cas de besoin, et d’aider à la formation des adhérents et des cadres de ces associations. Ces formations avaient lieu en week end, en session longues en été, en soirées etc. C’est ainsi que j’ai amené à la musique je ne saurais dire combien de personnes et formé beaucoup de chefs de choeur. (Jean Golgevit) [ Retour ]

2) L'ouverture de ces classes est rapportée dans Le Guide du Concert du 10 octobre 1947 (rubrique "Echos") : « On vient d'ouvrir au lycée Jean La Fontaine une classe préparatoire aux certificats d'aptitude à l'éducation musicale. » [ Retour ]

3) André Vessières, baryton. Au cours des années 1950-1960 on lui doit l'interprétation de bon nombre de rôles, principalement du répertoire français, dont plusieurs ont fait l'objet d'enregistrements. Avec l'Orchestre national de l'Opéra, Les Chœurs de la RTF et l'Orchestre Radio-Lyrique, l'Orchestre de la Suisse-Romande, l'Orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire ou encore l'Orchestre Radio-Symphonique il s'est produit dans Oedipus rex de Stravinsky, Mireille de Gounod (1954, festival d'Aix-en-Provence), Pelléas et Mélisande (rôle d'Arkel) de Debussy, Oedipe (Tirésias) d'Enesco, L'Ange de feu de Prokofiev, La Chèvre de Monsieur Seguin et Don Juan de Manara d'Henri Tomasi, Les Malheurs d'Orphée, Le Pauvre matelot et Le Retour de l'enfant prodigue de Darius Milhaud, Les Contes d'Hoffmann d'Offenbach, La Vestale de Spontini, Les Noces de Figaro (rôle d'Antonio, Festival d'Aix-en-Provence, 1956) et Don Giovanni (rôle de Masetto, id.) de Mozart...) (Denis Havard de la Montagne) [ Retour ]

4) André Musson. Collaborateur de la revue "L'Education musicale", il est longtemps maître de chapelle ou organiste dans plusieurs églises parisiennes. On le trouve à partir de 1931 à Saint-François-d'Assise (rue de la Mouzaïa, XIXe), puis à partir de 1945 à Saint-Etienne-du-Mont, où il succède au maître de chapelle Bernard Loth, et enfin peu après et jusque dans les années soixante à Notre-Dame-des-Victoires ou il est titulaire de l'orgue du chœur. (Denis Havard de la Montagne) [ Retour ]

5) Le lycée La Fontaine n'est plus le seul endroit où on étudie la musique en parallèle aux études : maintenant, on peut commencer à faire du mi-temps école-conservatoire à partir du primaire (école de la Bienfaisance, 8e arr.), puis au collège à Octave Gréard (8e), Lamartine et La Fontaine, puis au lycée à Lamartine et La Fontaine (en préparation au bac musical intitulé F11). Ces établissements sont en relations avec, notamment et surtout, le CRR de Paris (celui de Boulogne également). [ Informations communiquées par Alcibiade Minel ] [ Retour ]

6) " Jean Giraudeau nous impressionnait car il pouvait déchiffrer à vue du Stravinsky avec toutes les nuances et l'interprétation voulue, et donner l'œuvre en concert le lendemain ! Quant à sa pianiste, elle réduisait à vue une partition d'orchestre en faisant ressortir les thèmes principaux tout en soutenant les solistes ! Nous étions admiratifs. " (Jean Golgevit) [ Retour ]

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Les classes préparatoires au C.A.E.M., 1947-1974

 

 

Simone Cusenier, centre nat. de prép. au CAEM
Par Simone Cusenier
( photo coll. M-A Pech-Gougaud )

     Créé en 1947 sous l'égide de l'Inspecteur général Raymond Loucheur, le nouveau Certificat d'Aptitude à l'Enseignement Musical répondait à un besoin de rénovation, à une ambition nouvelle de l'Education nationale pour une discipline longtemps marginalisée dans l'Enseignement du Second Degré. Le lycée La Fontaine en devint le centre privilégié de préparation. Bien situé, presque neuf, le lycée réunissait les conditions les plus favorables, d'autant plus que sa configuration intérieure permettait d'isoler ces classes préparatoires et de limiter la gêne qu'aurait pu provoquer pour les autres disciplines le bruit — même mélodieux — d'un enseignement musical à plein temps. Au troisième étage, les salles 301 à 306 constituèrent un monde à part où, pendant vingt-sept ans, furent formés des centaines de professeurs d’Education Musicale, dont beaucoup sont encore en fonction.

     Le C.A.E.M. — concours de recrutement national — on l'avait voulu difficile et divers. Il devait exiger des candidats à la fois une solide formation musicale, ce qui est normal, mais aussi une sérieuse culture générale afin d'éviter l'écueil stérilisant d'une spécialisation trop exclusive et trop précoce.

     Au début, l'admission au Centre La Fontaine, encore peu connu, fut très ouverte. Comme conditions, le diplôme de bachelier et une formation musicale de base pour pouvoir suivre les cours, de haut niveau déjà, qui y étaient donnés. Mais après quelques années, les demandes d'admission devenant si nombreuses, il fallut sélectionner les candidats. C'est ainsi que se créèrent deux « Propédeutiques musicales », à Nancy au Lycée Frédéric Chopin sous la houlette de madame Dautremer et à Nice au Lycée d'Estienne d'Orves sous celle de madame Renaud. Les élèves bacheliers de section classique ou moderne y acquéraient, en un ou deux ans, la formation musicale qui leur permettait de se hisser au niveau de l'enseignement donné à La Fontaine. Le nombre des admis limité à quarante d'abord puis, après 68, à cinquante était réparti en deux classes par promotion : un numerus clausus sévère qui assurait un recrutement de qualité et donnait aux élèves admis les plus grandes chances d'être plus tard reçus, vite et bien, au C.A.E.M.

     Au fil du temps, il y eut d'autres centres de préparation au concours, mais La Fontaine était le plus recherché, le plus prestigieux.

     A partir du moment où elle eut trouvé sa vitesse de croisière, la préparation au C.A.E.M. à La Fontaine se faisait en trois ans, les deux premières années sanctionnées par le Premier Degré, la troisième par le Second Degré qui donnait le titre de Certifié et le droit d'enseigner dans les lycées et collèges ou les écoles normales.

     Les matières enseignées étaient variées et le recrutement du corps enseignant éclectique. Pour ce qui est de la musique, c'est à des professeurs du Conservatoire National Supérieur, tous renommés, souvent Prix de Rome, qu'étaient confiées les disciplines nobles par excellence, harmonie, solfège, formation vocale et instrumentale, avec mesdames Y. Desportes, J. Rueff, I. Joachim, I. Perrin, messieurs H. Challan, M. Bitsch, M. Franck, R. Boutry, A. Weber, J. Giraudeau, A. Vessières. C'est à des professeurs d'éducation musicale du Second Degré, particulièrement expérimentés et appréciés, qu'était laissé le soin d'enseigner dictées musicales (A. Musson), chant choral (J. Rollin), commentaires de disques (S. Lorin), pédagogie théorique et pratique avec les classes expérimentales du lycée (mesdames Souriac, Straus, Roux-Guesnier). Il y avait enfin le rôle très important dévolu aux historiens de la musique : G. Favre au début, puis lorsqu'il fut nommé inspecteur général, J. Chailley, brillant professeur à l'Institut de Musicologie à La Sorbonne, assisté ou relayé par P. Druilhe.

     Quant aux disciplines générales, elles étaient dispensées par des agrégés de l'Université, souvent professeurs de Lettres ou de Première supérieure. Pour le français, successivement ou simultanément Th. Van der Elst, messieurs Chambon et Denis, madame Anthony. Pour l'acoustique, monsieur Georgeais, très apprécié des étudiants, même les moins doués en physique. Pour l'histoire des civilisations en rapport avec l'histoire de la musique, S. Cusenier qui, de 1947 à 1974, s'est efforcée d'ouvrir des horizons artistiques tout neufs à des centaines d'élèves-professeurs d'Education musicale.

     Le Centre de préparation au C.A.E.M. avait au lycée une autonomie de fait — situation originale parmi les classes préparatoires — une liberté qui avait prévalu dès le début. Soulignée par son isolement au troisième étage de l'aile gauche du lycée (occupée actuellement par le C.N.R.), avec un régime spécial, des crédits spéciaux, l'indépendance du Centre reposait d'abord et surtout sur ses relations directes et privilégiées avec l'Inspecteur général de la Musique qui en était le véritable chef. Que ce soit Raymond Loucheur ou Georges Favre, c'est lui qui choisissait les professeurs de toutes les disciplines, même non musicales, qui définissait, en accord avec ceux-ci, le régime des études, qui fixait les dates de rentrée et de sortie, qui supervisait de loin, de façon panoramique et toute libérale la marche du Centre, mais sans jamais manquer d'associer courtoisement la Directrice du lycée aux conseils de professeurs tenus une ou deux fois l'an et de l'inviter aux différentes festivités organisées par les étudiants.

     Cela dit, il est indéniable que, à l'égard du Centre, la situation des chefs d'établissement était quelque peu délicate. Entre 1947 et 1974 toutes les Directrices se sont enorgueillies, semble-t-il, d'avoir au lycée ces classes préparatoires uniques en France, avec dans le corps enseignant des noms prestigieux ; mais elles n'ont pas eu tout à fait la même attitude à leur endroit : accueil chaleureux de madame Valensin de 1947 à 1951, tolérance aimable et amusée de madame Rousselet qui avouait modestement n'être pas très sensible à la musique, malgré un accessit de solfège jadis conquis au Conservatoire de Dijon, adoption enthousiaste de madame Saint Guily, éprise de musique et particulièrement d'art lyrique, relations très correctes, mais moins étroitement cordiales avec mademoiselle Fleury que d'ailleurs ne favorisaient guère les années difficiles 68-69.

     Le recrutement extérieur de la plupart des professeurs était un facteur supplémentaire d'indépendance. Chacun organisait sa discipline à son gré, sans autres impératifs que ceux du Concours. Pas de registres de notes, pas de compositions, mais des partiels et des mises en loge dont il décidait seul de la nécessité et de la fréquence et dont il ne rendait compte à personne.

     Il fallait pourtant qu'il y eut un lien constant entre les composantes du Centre : inspecteur, professeurs, étudiants, administration. C'est pour répondre à cette nécessité que, dès le début, avait été détachée une surveillante générale, elle-même relativement libre dans ses initiatives. C'est mademoiselle Colomb qui, dès 1947, inaugura la fonction avec enthousiasme, dévouement, vigilance et rigueur. Elle devait se maintenir, au-delà même de la retraite, jusqu'en 1967. Assumant une succession difficile, madame Mayer la remplaça. Elle sut, dans un style très différent, se faire apprécier grâce à son efficacité, sa bonne humeur, sa générosité, son courage qu'elle manifesta tout particulièrement lors des événements de mai-juin 68 et de la reprise délicate d'octobre 68.

     Les mouvements de contestation allaient d'ailleurs accuser davantage l'autonomie du Centre, avec l'institution d'un conseil paritaire enseignants-étudiants élus et d'un conseil de professeurs présidé par l'un d'entre eux également élu. En fait, cela ne changea pas grand-chose : l'Inspecteur général en apparence et provisoirement évincé, mais seul responsable du Centre au Ministère, continua tranquillement son office en attendant des jours meilleurs. La machine suffisamment bien rodée pouvait un moment tourner toute seule.

     En dehors de cette période de tension qui ne fut que passagère, l'atmosphère du Centre avait toujours été particulièrement sympathique, celle d'une grande famille soudée et solidaire : relations déférentes certes, mais directes, faciles et efficaces avec l'Inspecteur général ; rapports chaleureux, confiants, faits d'estime réciproque entre collègues dont la diversité d'origine et de formation assurait une complémentarité enrichissante ; relations amicales avec la surveillante générale toujours prête à aplanir les difficultés ; entre étudiants et professeurs rapports généralement confiants, parfois cordiaux, même s'il y avait de temps en temps des frictions inévitables ; esprit de corps des élèves fiers d'être  La Fontainiens » — même s'ils ne l'avouaient pas — avec le rituel correspondant : baptêmes de promotions, bizutages, revues satiriques des professeurs. Enfin, partie intégrante de la famille, Marguerite, l'employée préposée à l'entretien de ce « lieu sacré » qu'était le troisième étage du C.A.E.M. Tout sourire quand on respectait son parquet, ses murs, ses étagères et les plantes vertes qu'elle entretenait amoureusement dans le couloir, sourcilleuse en cas de manquements. Malheur aux étudiants surpris jetant papiers ou mégots ! Et tout le monde se soumettait gentiment à la dictature de la cire et du chiffon. Ah l'heureux temps ! On croit rêver en 1988... Quand le Centre disparut, Marguerite en fut très affectée. Maintenant, disait-elle, « j'ai le balai triste ». Elle aimait le travail bien fait et respecté. Et elle aimait aussi « ses musiciens ».

     Lorsque les classes préparatoires au C.A.E.M. reprirent à peu près normalement en octobre 1968, on put croire que le Centre, avec quelques réformes, fonctionnerait de nouveau. En fait, victime du remaniement général de l'enseignement et particulièrement du Supérieur, il était déjà condamné à disparaître à plus ou moins court terme. Malgré les démarches nombreuses de professeurs et d'étudiants au Cabinet du Ministre Edgar Faure (J. Delahaye, Y. Ferraton s'en souviennent-ils ?), il ne put devenir cette Ecole Normale Supérieure de la Musique dont on rêvait. Il survivra tout de même jusqu'en 1974, disparaissant lorsque le C.A.E.M. sera remplacé par le C.A.P.E.S. aligné sur les autres C.A.P.E.S. universitaires.

     C'est désormais à l'Université, à La Sorbonne d'abord puis, plus tard ailleurs aussi, que va s'organiser le cursus musical avec ses différents degrés, D.E.U.G., Licence, Maîtrise, Doctorat et ses deux concours de recrutement, C.A.P.E.S. et Agrégation créée en 1975. Mais disparu, le Centre La Fontaine survit d'une certaine façon, laissant de durables traces dans l'enseignement universitaire ; c'est Jacques Chailley, professeur à La Sorbonne, et aussi ancien enseignant à La Fontaine qui crée et dirige la première U.E.R. de Musicologie à l'Université Paris IV, et lorsqu'il sera appelé à d'autres fonctions, c'est Simone Cusenier, anciennement à La Fontaine, elle aussi, qui lui succède comme Directeur jusqu'en 1977. C'est souvent avec des enseignants de La Fontaine que s'est constitué à Paris IV le premier encadrement de l'U.E.R. de Musicologie.

     Actuellement, à Paris comme à Lyon, à Lille, à Aix ou ailleurs, ce sont souvent d'anciens « La Fontainiens » ayant conquis leurs grades universitaires qui enseignent dans les différentes U.E.R. et parfois les dirigent (J. Cizeron, Directeur à Lyon II, S, Durosoir, Directeur adjoint à Paris IV). A noter aussi que c'est en s'inspirant des exigences culturelles de la préparation à La Fontaine qu'ont été intégrées au D.E.U.G. de Paris IV des U.V. de Français, d'Histoire des Civilisations et d'Acoustique, et que le C.A.P.E.S. et l'Agrégation de Musique comportent des épreuves de culture générale.

     Faut-il rappeler aussi que les premières promotions d'agrégés ont compté de nombreux « La Fontainiens  » qui avaient eu le courage de reprendre leurs études, que certains préparent une thèse ou l'ont déjà soutenue. Agrégés ou non. Docteurs ou non, la plupart des anciens de La Fontaine sont encore en activité dans les Collèges, Lycées et Ecoles Normales de France, comme professeurs généralement mais aussi, plus rarement comme chefs d'établissement. Quant au corps des inspecteurs, il est presque en totalité « La Fontainien » : les I.P.R. et, au-dessus de la pyramide, madame Aubry, inspecteur général.

     Il y a enfin ceux qu'on pourrait appeler les « transfuges » de l'Education nationale — minoritaires, il est vrai — ceux qui, poussant plus avant leurs études musicales au C.N.S.M., ont opté, après de difficiles concours, pour la filière des Conservatoires comme professeurs, voire comme directeurs ; ceux aussi, très rares, qui, abandonnant l'enseignement, se sont voués à une carrière vocale ou lyrique.

     Histoire d'une expérience de pédagogie musicale ? Sans doute. Evocation nostalgique de ce qui a été et à quoi on a cru ? Peut-être un peu, c'est normal. Mais aussi fierté légitime de ce qui fut, en son temps, une institution prestigieuse, non sans défauts certes, mais créée dans l'enthousiasme, épanouie librement dans un Lycée La Fontaine accueillant. Satisfaction de voir le Centre survivre sous des avatars divers. Fidélité aux collègues, tous des amis, dont beaucoup déjà ont disparu. Souvenir amical à nos anciens étudiants qui ont essaimé et semé à la mesure de leurs talents. C'est de tout cela que ce papier rédigé pour le Cinquantenaire est porteur.

     Un arbre sorti d'une bonne terre n'est jamais tout à fait mort s'il a su pousser de vivaces surgeons.

 

 

(source : coll. Marie-France Carbuccia)



Le témoignage d'un ancien:
Jean GOLGEVIT

Jean Golgevit
(photo Richard Bruston, ca 1984)


Il était une fois…

C’est l’histoire d’un jeune homme, la mienne, qui n’est pas qu’une histoire personnelle car elle est reliée aussi à l’histoire des classes du CAEM, les classes accueillies au Lycée La Fontaine, lycée de filles, pour la préparation à l'examen et au concours du professorat de musique.

C’est l’histoire d’un garçon qui ne savait pas s’exprimer autrement qu’en musique. Entre le yiddish et le français il ne savait quelle était sa langue maternelle. Il lui a fallu arriver en classe de philo pour découvrir comme le français pouvait être une expression artistique et donc l’adopter. Il a cheminé « normalement » jusqu’au Bacc mais se languissait. Encore bien qu’il jouait du violon, son instrument de l’âme.

Puis ce fut par ma rencontre avec la sœur de Patrice Fontanarosa1 que j’appris l’existence du professorat de musique ! Oh joie ! Je passe les péripéties jusqu’à mon entrée au Lycée La Fontaine.
C’est le paradis de la musique qui s’ouvrait devant moi. J’allais enfin tout apprendre, tout comprendre, baigner dans ma propre vie !

J’ai eu la chance d’avoir des professeurs remarquables : le fondateur de cet enseignement, Jacques Chailley, maître si cultivé et si exigeant et qui disait toujours « - Vérifiez tout, même ce que je vous dis ! » Lorsque j’ai assuré des formations, plus tard, j’ai toujours eu le plaisir de citer mes sources, la sienne en particulier.

Simone Cusenier qui nous fit découvrir les arts, qui nous a amenés au Louvre, etc. Nous avions le Bacc et nous découvrions enfin la culture.

Henri Challan, notre excellent professeur d’harmonie qui disait, avec son cheveu sur la langue lorsque nous chahutions parfois « - La muzique ne vous déranze pas trop ? »

Jean Giraudeau, capable de déchiffrer à vue du Stravinsky, ainsi que son accompagnatrice Catherine Brilli réduisant à vue une partition d’orchestre en faisant ressortir les thèmes principaux !

Bref nous avons bénéficié d’une excellente formation.

L’évènement que je veux relater ici est une tache dans ce monde de beauté. Tout s’est en effet gâté lorsque j’ai commencé à porter un regard critique sur la formation dans laquelle je venais d’entrer par concours. Je croyais naïvement que la musique ne pouvait être servie que par des âmes nobles et pures, lorsque je découvris notre statut bancal, nos droits d’étudiants limités, notre isolement dans le monde étudiant. Contrairement aux formations reconnues, notre engagement était quinquennal et non décennal. Nous avions tout juste le droit au restaurant universitaire, mais aucune aide au logement étudiant. Devenus titulaires du Certificat d'Aptitude à l'Éducation Musicale, nous devions 20 heures de cours au lieu de 18 dans les autres disciplines etc. La préparation pédagogique restait théorique et nous ignorions tout de l’enfant que nous allions avoir comme élève, les stages en collèges n’étant pas prévus dans notre formation. Ces anomalies trouvèrent leur explication dans le Journal Officiel que je dépouillai jusqu’à Napoléon pour découvrir que le métier de professeur de musique … n’existait pas !

J’ai ainsi entrepris une action pour faire reconnaître officiellement notre futur métier. Je n’étais pas conscient du vaste coup de pied que je m’apprêtais à donner dans la fourmilière en prétendant changer la donne : ce n’était rien de moins qu’un acte syndical. Je devais payer très cher ma prise de conscience et ma prise de position. L’absence de statut officiel de notre formation avait obligé son fondateur, Jacques Chailley, à trouver des palliatifs pour le paiement des professeurs qu’il recrutait lui-même. Ne disposant pas de postes budgétaires (et donc de couverture sociale pour les profs), il était obligé de les faire payer par l’institution dans laquelle ils étaient titulaires, et donc en heures supplémentaires. La reconnaissance statutaire que je réclamais constituait un total bouleversement que la hiérarchie n’était pas préparée à subir. L’idéal de beauté, de culture pesait de peu de poids devant les réalités.

Le premier résultat de mon action fut que je perdis la bourse qui m’était octroyée, étant fils d’un petit artisan et considéré comme pupille de la nation : ma mère a été déportée à Auschwitz.
L’Inspecteur Georges Favre, alerté par certaines personnes, avait obtenu qu’une enquête soit menée relative au train de vie de mes parents. J’eus à subir des humiliations (je « volais la place » de quelqu’un d’autre m’avait dit la directrice du Lycée La Fontaine) et de graves injustices dont la plus inacceptable est celle-ci :

A l’examen du 1er CA, il y a eu, pour la première fois dans l’histoire du C.A.E.M., 10 recalés ! L’observation des faits montre que j’étais le premier de la liste ce qui entraînait l’échec des 9 qui avaient obtenu des notes inférieures aux miennes.
Je n’ai jamais pu voir dans cet épisode autre chose qu’un coup monté pour m’éliminer.

Et là s’est posé un problème : que faire de ces 10 recalés ? le problème ne s’était jamais posé. Seul le 2d CA donnait le diplôme final. Le 1er CA n’était qu’une étape. La règle intangible était un cursus de trois années, ce qui rendait le redoublement impossible. Je me suis rapidement aperçu que les dommages étaient plus grands pour les garçons que pour les filles ; j’y ai vu une « ségrégation sexiste » que j’ai à nouveau dénoncée ; en effet, les filles ont tourné le problème en quittant La Fontaine pendant un an et sont revenues l’année suivante passer le 2d CA.

Les garçons, eux, devaient justifier d’un statut d’étudiant pour rester sursitaire et ne pas être engagé sous les drapeaux (nous étions en pleine guerre d’Algérie) : ils ont donc été obligés de redoubler, repasser le 1er CA puis quitter La Fontaine et se débrouiller seuls pour passer le 2d CA. Or l’énorme différence de niveau entre les deux CA rendait l’entreprise très difficile. De ces 10 j’ai été le seul à réussir. Mon regret encore actuel : ces 10 que je crois toujours injustement recalés.

Au cours de ces trois années de travail studieux et de combat para-syndical, j’avais beaucoup appris, de la musique et de la société. Mais j’avais réussi à convaincre un certain nombre de mes camarades de me suivre dans ma démarche solidaire ; je me suis rapproché des étudiants de l’AGPLA (formation des prépas littéraires) et nous nous sommes retrouvés à l’UNEF, ce qui était un beau triomphe.

Depuis, la formation musicale est entrée à l’université, mais je conserve le regret de la disparition de ces classes de formation d’un tel niveau d’excellence.


Voici la phrase qu’une amie de l’époque me demande d’ajouter, je la cite : « c’est ton action, Jean, qui a éveillé chez nous tous la conscience syndicale ; cette conscience syndicale qui, une fois éveillée, ne s’endort jamais et transforme le jeune adulte en citoyen(ne) lucide et non manipulable. Merci, et pour toujours. »


Fait à Montpellier le 11 décembre 2021
Jean Golgevit
jeangolge@gmail.com
06 79 97 37 32

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1) Nous étions tous deux élèves d’une remarquable professeur, Yvonne Blot. [ Retour ]





LISTE DES PROFESSEURS
Année 1952-1953
Histoire de la musique Jacques Chailley
Harmonie Henri Challan
Histoire des civilisations Simone Cusenier
Solfège et déchiffrage Maurice Franck
Acoustique Pierre (?) Mériel
Dictée musicale André Musson
Chant Jean Planel
Chorale, présentation d'oeuvres Jean Rollin
Pédagogie Blanche Souriac
Littérature Thérèse Van der Elst
Année 1958-1959
Accompagnement Yvonne Desportes, Ida Perrin
Acooustique M. Georgeais
Chant Jean Giraudeau
Chorale, présentation d'oeuvres Jean Rollin
Dictée musicale André Musson
Harmonie Marcel Bitsch, Henri Challan, Alain Weber
Histoire de la civilisation Simone Cusenier
Histoire de la musique Jacques Chailley
Littérature MM. Chambon, André Fermigier, Guichemerre
Pédagogie Mlle Jeanne Roux, France Strauss
Solfège Maurice Franck, Jeanine Rueff
Année 1964
Littérature MM. Chambon, Denys, Bouvet, Mlle Guignabert
Histoire de la civilisation Simone Cusenier
Histoire de la musique Jacques Chailley, Paule Druilhe
Travaux pratiques d'histoire de la musique Paule Druilhe
Solfège Maurice Franck, Jeanine Rueff
Piano et déchiffrage Ida Perrin, Yvonne Desportes
Transposition, accompagnement Yvonne Desportes, France Pennetier
Harmonie Henri Challan, Marcel Bitsch, Alain Weber
Technique vocale Jean Giraudeau, Irène Joachim
Accompagnateurs des classes de technique vocale France Soudères-Pennetier, Jean-Claude Pennetier
Pédagogie France Strauss, Mlle Jeanne Roux
Direction chorale Jean Rollin
Commentaires d'oeuvres enregistrées Suzanne Lorin
Dictées musicales André Musson, Martine Breton
Acoustique M. Georgeais
Année 1967 (?)
Littérature MM. Chambon, Denys, Bouvet, Mme Anthony
Histoire de la civilisation Simone Cusenier
Histoire de la musique Jacques Chailley, Paule Druilhe
Travaux pratiques d'histoire de la musique Paule Druilhe
Solfège Maurice Franck, Mme Staskevitch
Piano et déchiffrage Ida Perrin, Yvonne Desportes
Transposition, accompagnement Yvonne Desportes, France Pennetier
Harmonie Henri Challan, Marcel Bitsch, Alain Weber, Jeanine Rueff (?), Maurice Franck (?)
Technique vocale André Veyssières, Irène Joachim
Accompagnateurs des classes de technique vocale France Soudères-Pennetier, Jean-Claude Pennetier
Pédagogie France Strauss, Mlle Jeanne Roux
Direction chorale Roger Boutry
Commentaires d'oeuvres enregistrées Suzanne Lorin
Dictées musicales André Musson, Martine Breton
Acoustique M. Georgeais
Années 1972-1974
Histoire de la civilisation Simone Cusenier
Pédagogie France Strauss
Commentaires d'oeuvres enregistrées Suzanne Lorin
Histoire de la musique Paule Druilhe
Transposition, accompagnement Yvonne Desportes
Déchiffrage vocal, mélodies et lieder Georges Guillard
Dictées musicales Josette Aubry
Harmonie Jean-Paul Holstein, Michel Merlet
Chant M. Perron
Acoustique M. Georgeais
Ces tableaux: contribution de M. Jean Lenoble, Beaumont et M. Claude Verger, Clermont-Frd.

Description du concours d'entrée au Centre nat. de préparation, en 1965.
( in Fidelio n°28, bulletin interne des étudiants. Coll. Jean Lenoble, Beaumont. )

Ont contribué à ces pages sur le Centre national de préparation au C.A.E.M.: (ordre non significatif, indiquez-moi les oublis!) Jean Lenoble, Marie-France Carbuccia, Christian Balandras, Marie-Antoinette Gougaud (Pech), Claude Lévy, Henri-Claude Fantapié, Jean Golgevit, Sylvie Golgevit, Claudette Girard Beaujean, Denyse Miegeville, Maryvonne Garnier (Houguet), Danielle Maze, Renée Mattei, Marie-Françoise Donval (Barbier), Bernard Ravenel, Paul Caubisens, Michel Baron, Thérèse Pedrero, Josée Halbedel, Claudine Clairay (Bonafous), Marie-Jo Muller (Bonneterre), Viviane Gransart, Claude Verger, Marie-Claire Chaumas.

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