Le Panthéon des musiciens

De janvier 2019 à décembre 2019

Raymond COURT - Jean GUILLOU - Jean-Christophe BENOÎT - Félix MOREAU - Véronique BLANC - Georges JOLLIS - Lucie ROBERT-DIESSEL - Roger BOUTRY - Raymond LEPPARD - Paul COUËFFÉ

 

Raymond Court en 2014
Raymond Court en 2014
(coll. P. Guillot) DR.

Le professeur Raymond COURT nous a quittés le 17 janvier 2019 [à Bourg-en-Bresse] dans sa 95e année. « Il est parti sans rien dire ». Tel la Mélisande de l’opéra debussyste qu’il admirait tant. Et en plein accord avec l’être qu’il fut, « soi-même à soi-même », au long de sa carrière de philosophe, d’esthéticien de musicien et d’érudit : modeste, discret, quoique toujours « en acte ».

Né à Lyon le 13 décembre 1924, il est le petit cousin de l’abbé Johannès Favier, maître de chapelle de la primatiale Saint-Jean-Baptiste, qui l’initie à l’orgue puis l’introduit auprès du titulaire de cette même primatiale, Édouard Commette. Ce dernier le conseille et parfait sa formation organistique tandis qu’il mène parallèlement ses études secondaires et supérieures. Agrégé de philosophie (1961), docteur ès lettres (1973) avec une thèse sur Le Musical. Essai sur les fondements anthropologiques de l’art (Paris, Klincksieck, 1976), Raymond Court est professeur de philosophie à Louhans (Saône-et-Loire), puis au lycée Lalande de Bourg-en- Bresse (1952-1966) enfin aux universités Jean-Moulin et Louis-Lumière de Lyon (1966-1985) où il enseigne également l’esthétique. Peu d’années après son arrivée à Bourg, il supplée l’organiste titulaire de la basilique du Sacré-Cœur, Louis Guyot, avant de lui succéder, serviteur fidèle et bénévole d’une liturgie et d’une Église dont l’évolution post-conciliaire interrogera sans cesse l’organiste et le penseur. D’abord au banc d’un « électronium » de Dereux qu’un « maître » lyonnais était venu promouvoir auprès du curé, ce qui l’irrita profondément. Enfin (vers 1973) aux claviers d’un orgue à tuyaux Henri Saby, qui sera, non sans péripéties, totalement reconstruit et agrandi en 1983 par la Manufacture d’orgues bressane [Robert Flory] (2 claviers, pédalier, 21 jeux, transmission mécanique).

Pendant ses trente années de titulature (1964-1994) Raymond Court allait être en musicien praticien-esthéticien, théologien même, le questionneur inlassable et en profondeur des relations entre l’art et le sacré (musique – avec Bach au sommet –, peinture, sculpture, architecture), dont il avait mis les différentes dimensions (langage, sens, symboles, temps, etc.) au centre même de sa réflexion pour en dévoiler, toutes époques confondues, le sublime et la transcendance. Nous l’atteste son imposante bibliographie (7 livres et quelque 60 articles) dont on trouvera sans peine les références. Son ouvrage ultime, La Manifestation esthétique, est paru à Paris chez L’Harmattan en 2014. Il le considérait volontiers comme son « testament ». Il est bien l’épitomé même de sa longue constante réflexion.

Pierre Guillot

Le 26 janvier 2019, à Paris, s’est éteint le pianiste et organiste Jean GUILLOU à l’âge de 88 ans. Mondialement connu, tant comme interprète que pédagogue et compositeur, il milita durant plusieurs décennies pour l’évolution de l’orgue qu’il voulait faire sortir de l’église afin de voir l’instrument roi s’exprimer dans des lieux non cultuels, en regrettant l’actuelle inculture musicale des prêtres. Artiste visionnaire, comme il a été parfois qualifié, il avait conçu de nouveaux instruments d’une esthétique originale aux sonorités nouvelles donnant ainsi un style à l’orgue du XXe siècle, notamment ceux la Tonhalle de Zürich, du Conservatoire de Naples, de l’auditorium de Tenerife à Santa Cruz et des églises Notre-Dame des Neiges à l’Alpe-d’Huez, Notre-Dame-des-Grâces du Chant d’oiseaux à Bruxelles et des Portugais à Rome. Sa personnalité musicale qui lui était propre transparaît à travers ses œuvres avec la création d’un nouvel aspect de l’orgue : la dramaturgie faisant appel au discours littéraire et poétique totalement indépendant du contexte religieux, que l’on retrouve notamment dans Hypérion ou la Rhétorique du feu (op. 45, 1988) ou La Révolte des orgues pour grand orgue, 8 orgues portatifs, percussions et un chef (op. 69, 2005-2007). A St-Eustache, où il avait exercé durant plus d’un demi-siècle aux claviers du grand orgue devenu « le plus important de France » en 1989 avec sa reconstruction par le facteur hollandais Van den Heuvel (5 claviers et pédalier, 101 jeux, 147 rangs, 8000 tuyaux), il s’était vu quelque peu contrarié en 2015 par « l’invitation » du curé de la paroisse à laisser sa place à une nouvelle génération. Dans l’histoire des organistes ce n’était hélas pas la première fois qu’un ecclésiastique faisait preuve d’un comportement aussi peu courtois : Alexandre Georges à St-Vincent-de-Paul (Paris) en 1928, Eugène Lacroix à Notre-Dame-de-Lourdes (Paris) en 1940, Félix Moreau à la cathédrale de Nantes en 2006, Chantal de Zeeuw à la cathédrale d’Aix-en-Provence (2017)…

Jean Guillou
(Photo X..., vers 1970) DR.

C’est à Angers (Maine-et-Loire), le 18 avril 1930, que voit le jour Jean-Victor-Arthur Guillou, fils de Victor Guillou (1892-1954), directeur commercial, descendant d’une famille de marins bretons de Concarneau (Finistère), et de Marguerite Lissonnet (1898-1993), issue d’une famille du Val de Loire. C’est ainsi qu’après avoir tapoté sur le piano familial il débute l’apprentissage de la musique auprès de Raphaël Fumet, fils du compositeur Dynam-Victor Fumet. Installé à Angers au moment de la seconde guerre mondiale, ce professeur enseignait alors le piano et l’harmonie, tout en tenant l’orgue de l’église St-Joseph, un Cavaillé-Coll de 1879 sur lequel le jeune Guillou prit des leçons. Dès l’âge de 12 ans, en 1942, il est nommé à l’orgue de l’abbatiale St-Serge d’Angers, un instrument d’une trentaine de jeux (2 claviers et pédalier) construit par Daublaine-Callinet en 1843. Parallèlement, en 1945, il fréquente le Conservatoire national supérieur de musique de Paris où il suit notamment les cours de Maurice Duruflé (harmonie) et Olivier Messiaen (analyse musicale). Grâce à sa dizaine d’années passée à l’orgue de St-Serge lui ayant permis d’acquérir une pratique et une aisance de l’instrument, il peut également entrer dans la classe de Marcel Dupré où il décroche un 1er prix en 1954. Dès l’année suivante, il est nommé professeur d’orgue et de composition à l’Institut de musique sacrée de Lisbonne, avant de s’installer à Berlin en 1958 où ses récitals et créations de ses premières compositions sont alors très appréciés dans le milieu artistique.

A Paris, au cours de ses études musicales et durant plusieurs années jusqu’en 1956, il touche l’orgue de la synagogue de la rue Copernic (XVIe arrondissement), succédant en 1953 à la musicologue et organiste Suzanne Haïk-Vantoura ; Joachim Havard de la Montagne recueillera sa succession en 1956. Plus tard, en 1963 Jean Guillou, toujours établi en Allemagne, est appelé à succéder à André Marchal, démissionnaire, au grand orgue de St-Eustache à Paris. C’est le Père Emile Martin, alors directeur des Chanteurs de St-Eustache fondés par ses soins en 1945 et qu’il avait précédemment connu, qui intercède en faveur de cette nomination. Resté en poste jusqu’en 2015, moment où il doit quitter sa tribune avec regrets, cette longue période aux claviers de cet instrument lui permet de se faire connaître et surtout reconnaître des Français, qui découvrent au fil des années son génie musicale, tant à l’église que dans ses concerts et autres récitals. Bien que ses registrations quelque peu colorées d’œuvres classiques et ses transcriptions de pages musicales très connues (Offrande musicale de Bach, Tableaux d’une exposition de Moussorgsky, Petrouchka de Stravinsky…) ne sont pas toujours appréciées par certains, on ne peut nier ses capacités créatrices. Ses quelque 86 numéros d’opus étalés sur 64 années de composition (op. 1 en 1952, op. 86 en 2016), en témoignent. On lui doit en effet un catalogue varié, dans lequel il aborde des genres différents. Plusieurs publications listent l’intégralité des œuvres, dont la majorité est éditée en Allemagne, chez Schott à Mayence, en dehors des pièces pour orgue chez Leduc, aussi nous n’en citerons ici que quelques-unes afin de démontrer l’éclectisme du compositeur : des œuvres pour orchestre (Triptyque pour orchestre à cordes, Judith Symphonie, pour mezzo-soprano et grand orchestre, créée le 25 février 1971 par l’Orchestre philharmonique de l’O.R.T.F. et la mezzo-soprano Chrystyna Szostek-Radkowa, Symphonie n° 2 pour orchestre à cordes, Symphonie n° 3 pour orchestre et 2 guitares, Concerto pour trombone, 2 Concertos pour piano et orchestre, 8 Concertos pour orgue et orchestre…), de la musique de chambre (Trio pour 3 violoncelles, Colloque n° 3 pour hautbois, harpe, célesta, percussion, 4 violoncelles et 2 contrebasses, Chronique pour trio de percussions…), des pages vocales (Stabat mater pour voix de femmes, orchestre et orgue, Poème de la main, pour soprano lyrique et piano, Main menue pour mezzo-soprano et piano, L’Infinito pour basse et orgue, Andromède pour soprano et orgue, Aube pour chœur à 12 voix mixtes et orgue…), de la musique pour piano seul (3 Sonates, Toccata, Intermezzo, Variations…) et une quarantaine d’œuvres pour orgue seul (Fantaisie, Sinfonietta, Toccata, 18 Variations, Scènes d’enfants, Symphonie initiatique pour 3 orgues, Jeux d’orgue, Sonate en trio, La Révolte des orgues pour grand orgue, 8 orgues portatifs, percussions et un chef, op. 69, 2005-2007…)

Passionné de pédagogie, Jean Guillou a toujours enseigné son art. Après Lisbonne et Berlin, c’est surtout en Suisse, au Meisterkursus de Zürich qu’il a dispensé ses cours d’interprétation et d’improvisation avec quelques 300 élèves, venus du monde entier, formés entre 1970 et 2005. Sa discographie impressionnante compte plus de 100 enregistrements, principalement effectués chez Philips, Dorian et Festivo. L’Association « Augure », créée en juin 2007 par Sylviane Falcinelli, Jean-Claude Bénézech et Philippe-Marie Ponçon, pour contribuer au rayonnement de l’œuvre de Jean Guillou, recense notamment cette vaste discographie (www.jean-guillou.org). En dehors des œuvres habituelles enregistrées par bon nombre d’organistes, celle-ci nous permet de garder le souvenir et d’écouter religieusement, en dehors de ses propres œuvres, certaines de ses magistrales improvisations et de ses transcriptions imposantes. Signalons également son ouvrage intitulé L’Orgue, souvenir et avenir dans lequel il raconte l’histoire de cet instrument et sa description, mais aussi donne des éléments de sa maîtrise pour le toucher, l’interprétation, l’improvisation et l’art de la registration (4e édition en 2010, édition Symétrie, avec 2 CD).

En 2010, Jean Guillou avait refusé sa nomination dans l’ordre de la Légion d’honneur la jugeant inconciliable avec « la place diminuée de toutes les instances officielles » de la musique classique. Ses obsèques ont été célébrées le 5 février 2019 en la cathédrale Notre-Dame de Paris, suivies plus tard de son inhumation au cimetière du Père-Lachaise, en présence notamment de son épouse Suzanne Varga, hispaniste renommée, de sa fille Béryl Fürterer-Zuccarelli, née d’une précédente union, et de sa petite-fille Hélène Zuccarelli.

Denis Havard de la Montagne

Jean-Christophe BENOIT (1925-2019)
Page spécifique

Félix MOREAU (1922-2019)
Page spécifique

Véronique BLANC, organiste, nous a quittés le 14 juillet 2019 à l’âge de 60 ans. Née Bonn le 3 mars 1959 à Marseille (piano avec Pierre Barbizet), elle avait débuté ses études musicales au Conservatoire de sa ville natale, avant d’entamer sérieusement l’apprentissage de l’orgue en 1977 sous la direction de Marie-Louise Jaquet-Langlais. De 1979 à 1984, elle se perfectionna au Conservatoire national supérieur de musique de Paris : harmonie (Jean Lemaire), contrepoint (Bernard de Crépy), fugue (Michel Merlet), orgue (Rolande Facinelli). 1er prix d’orgue (exécution) en 1983, la même année que Luc Antonini, elle remporta l’année suivante le Prix spécial d’improvisation au Concours international de la Ville de Rennes et en 1985 le Grand Prix du 3e Concours européen de Beauvais. A partir de cette même année, elle suivit aussi les cours d’orchestration et d’instrumentation sous la direction de Marius Constant, et d’improvisation avec Rolande Falcinelli, Michel Chapuis et André Isoir. Comme organiste elle a principalement exercé à Saint-Maurice de Bécon-les-Bruyères (1981) sur le beau Cavaillé-Coll de 1865 (37 jeux) du marquis de Lamertye, installé dans cette église en 1912 et inauguré par Gigout, puis (2000) à l’abbatiale Notre-Dame des Ardents de Lagny-sur-Marne où est installé depuis 1980 par le facteur Jacques Petit-Falaize un instrument de 36 jeux. Mentionnons encore le petit orgue Suret (10 jeux) de la chapelle Saint-Charles à Asnières, mais dépendant de la paroisse Saint-Maurice de Bécon, qu’elle toucha durant plusieurs années. Egalement pédagogue, elle avait enseigné l’orgue à Arcueil. Musicienne complète et ouverte sur le monde, ses obsèques religieuses auront lieu le 19 juillet à Lagny.

D.H.M.
Abel Gaborit
(photo X...) DR.

L'abbé Abel GABORIT est mort, à Angers (Maine-et-Loire), le 21 juillet 2019, dans sa 86ème année. Né à Antigny (Vendée) le 6 avril 1934, fils et petit-fils d’organistes, il fut ordonné prêtre en 1960 et aussitôt nommé professeur de lettres et de musique au petit séminaire des Herbiers en Vendée (actuel Lycée Jean XXIII) et organiste titulaire du Cavaillé-Coll de la cathédrale Notre-Dame de l’Assomption de Luçon. Il succédait à ce poste à l'abbé Pierre Bioget (1912-1960) qui venait de mourir à l'âge de 47 ans et qui était l'un de ses premiers maîtres au grand séminaire de Luçon. L'abbé Gaborit, qui avait également étudié auprès de l’abbé Félix Moreau (1922-2019), organiste de la cathédrale de Nantes, et d'André Isoir, a tenu ce magnifique instrument durant quatre décennies et a donné des récitals dans le monde entier. On lui doit en Vendée, la création en 1962 des premiers « Stages des Jeunes Organistes » liturgiques. En 1999, il laissait les claviers de la cathédrale de Luçon à Guillaume Marionneau, puis, après une année sabbatique passée à l’abbaye Saint-Martin de Ligugé (Vienne), était incardiné au diocèse de Bourges où il a terminé son ministère en paroisse. En 2016, il se retirait à la maison de retraite Saint-Martin à Angers. Il laisse quelques œuvres vocales de circonstance et, avec la participation des abbés Moreau, Néraud et Ridier aux côtés de l’abbé Louis Delhommeau, une plaquette de 39 pages sur les Orgues et organistes de la cathédrale de Luçon (Luçon, imprimerie S. Pacteau, 1967).

Olivier Geoffroy/DHM


Georges JOLLIS (1927-2019)

Lucie ROBERT-DIESSEL (1936-2019)

Roger BOUTRY (1932-2019) - Pages des Prix de Rome.

(photo X...) DR.



Le chef d'orchestre et compositeur Raymond LEPPARD est décédé à Indianapolis (USA) le 22 octobre 2019, à l’âge de 91 ans. Né en Grande-Bretagne à Londres le 11 août 1927, il eut un long parcours avec le Trinity College de l'Université de Cambridge, d'abord comme diplômé (1952) puis comme lecteur de 1957 à 1961. C'est pendant cette période qu'il commença à s'intéresser à la naissance de l'opéra, surtout en Italie. Conseillé par Benjamin Britten, il s'est attaché en recherchant dans les rayons de La Marcienne à Venise à retrouver des partitions d'opéras qui comme souvent à l'époque se résumaient aux lignes des solistes et à la basse continue. Cela lui permettra de remettre au premier plan des œuvres de Monteverdi comme le Couronnement de Poppée (Glydebourne, 1962), ou des opéras de Francesco Cavalli, tels La Calisto et L'Ormindo.

 

Ces recherches ne l'empêchent pas de créer son propre ensemble orchestral, puis de rejoindre l'English Chamber Orchestra en 1960. Raymond Leppard pour autant ne cèdera pas à la tentation de produire des œuvres recherchant « l'authenticité musicologique », en ne recourant pas aux instruments d'époque, par exemple.

 

Sa carrière de chef prend son essor, d'abord à la tête de l'Orchestre de la BBC du Nord (1973-1980), puis de chef principal de l'orchestre symphonique de Saint Louis (USA), puis enfin de chef de l'orchestre symphonique d'Indianapolis. De 1982 à 2001, il en fera une phalange respectée, en permettant l'enregistrement de huit œuvres, en proposant une saison de cinquante-deux semaines. Il sera enfin conseiller musical permanent de l'orchestre de Louisville (USA) de 2004 à 2006.

 

La discographie de Raymond Leppard est abondante, et si elle recouvre largement toutes les productions des XVIIèmes et XVIIIèmes siècles (beaucoup de Monteverdi, de Bach, de Haendel avec une bouleversante Rodelinda), le répertoire s'est beaucoup ouvert aux œuvres des XIXèmes et XXèmes siècles, du moins du début du XXème, car les recherches sérielles ne l'ont pas attiré.

 

Son approche est en tout cas particulière ; l'utilisation d'instruments contemporains, de formations orchestrales plus étoffées, le poussent à une plus grande clarté, à une recherche constante de la polyphonie, à une attention extrême portée à l'individualisation des pupitres, bref à une mise en valeur des échanges et des dialogues entre musiciens. Il n'est que d'écouter son incontournable version de la Cantate BWV. 140 « Wachet auf ! ruft uns die Stimme » avec l'English Chamber Orchestra et notamment Elly Ameling pour se convaincre qu'un relatif hédonisme musical n'empêche pas la production d'œuvres très lisibles, très claires, sans compromis.

Luc Paraire


 

L’organiste Paul COUËFFÉ vient de nous quitter, discrètement, le 20 novembre 2019 à Lyon… Paul Couëffé était né à Angers (Maine-et-Loire) le 28 juin 1931. Il débute ses études musicales au conservatoire de cette ville et obtient un prix d’excellence de piano et de musique de chambre dans les classes de Raphaël Fumet et Henry Becker, puis il devient l’élève d’André Fleury au conservatoire de Dijon dans les classes d’orgue et de piano supérieur, et fréquente assidûment la tribune de la cathédrale St Bénigne où exerce Fleury. Ce dernier le recommande ensuite à Adrien Rougier, alors organiste de St Pothin à Lyon.

Paul Couëffé
Paul Couëffé à son orgue des Domicains
(coll. H. Désarbre) DR.

 

En 1953, il est nommé organiste titulaire des Dominicains de Lyon en l’église du Saint Nom-de-Jésus, dont il fera un haut lieu musical lyonnais. En 1959, il crée avec son frère Yves Couëffé, trompette solo de l’Orchestre national de France, les premiers concerts orgue et trompette en France.

 

Concertiste, soliste de l’Orchestre national de chambre de Toulouse, de l‘Ensemble Instrumental de Grenoble et de l’Orchestre national de Lyon, il participe également en qualité d’organiste à de nombreux concerts et récitals en France et à l’étranger : Canada, Mexique, Vénézuela, Italie, Hollande, Tchécoslovaquie, Suisse, Allemagne, Hongrie. Il est régulièrement invité à Berlin de 1978 à 2001. En 1970, il est invité d’honneur au festival international Johann Sebastian Bach à Leipzig et donne un récital de musique française en la cathédrale Ste Edwige de Berlin. En 1980, Pierre Cochereau, directeur du nouveau CNSM de Lyon, le nomme accompagnateur dans les classes de direction de chœur et de chant choral que dirige Bernard Têtu. Il est également accompagnateur du chœur de l’Orchestre national de Lyon de 1980 à 1992.

 

Il a joué sous la direction d’éminents chefs tels Ken Nagano, Serge Baudo, Theodor Guschlbauer, John Nelson, Louis Auriacombe, Emmanuel Krivine, Michel Corboz, Maurizio Arena…

Paul Couëffé présidait l’ « Association André Fleury ».

 

Paul était un organiste de grand talent, à la technique solide, à la vision claire, à l’analyse parfaite, à la musicalité sans défaut. Il a consacré une grande part de ses concerts aux compositeurs du XX° siècle, notamment Reveyron et Bouvard (la filière lyonnaise !), mais aussi Fleury, ou encore Fumet, en même temps qu’il faisait chanter Bach ou Corrette. C’est, on peut le dire, lui qui avait lancé la « mode » du trompette et orgue, avec son frère Yves. Et il avait fait du Saint-Nom de Jésus, à Lyon, un véritable sanctuaire musical durant plus de 60 ans, jusqu’en 2014, année où il prit sa retraite. C’est en cette église que la messe de funérailles est célébrée le 27 novembre à 14 heures.

 

L’homme était d’une grande gentillesse, avec un humour décapant, mais jamais méchant. Un maître débonnaire, à la carrière superbe, dont il y avait toujours quelque chose à apprendre.

 

Le souvenir d’André Fleury nous avait réunis ; j’avais eu la joie de l’avoir en récital au Val-de-Grâce, et nous avions partagé un concert à La Madeleine, à Paris, à la mémoire de notre maître, en compagnie de François Lemanissier, Françoise Pech, Wilhelm Hafner et Christophe Simon, autre ami, et ancien condisciple à la Schola, disparu également.

 

On trouve sur Youtube quelques extraits du concert de Paul Couëffé au Québec ; dégustez-les…

 

Hervé Désarbre

Organiste titulaire de l’église du Val-de-Grâce

 


 


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